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5 juillet 2012 4 05 /07 /juillet /2012 13:31


IL REVIENT (ET IL NEST PAS CONTENT) !

Stéphane Denis

 

 22 heures et 25 minutes – (54ème sur 220) pour un objectif « raisonnable » à 24 heures. Il y a tout lieu d’être très satisfait.  Après un très gros carton rouge sur hernie discale en 2010 et une année 2011 blanche coté montagne, repos oblige, le retour est plutôt convaincant. Le Caldeira Trail, début avril, avait été en ce sens, encourageant. Cette 97.4 en est la confirmation : retour à ce qui est, peu ou prou, mon meilleur niveau sur ce genre d’exercice.

Alors, Champagne ? Ben non. Une joie très mitigée. Car, au-delà du chrono plutôt flatteur et de l’immense satisfaction de voir le physique répondre présent, ce Raid 97.4 me laisse un poil dubitatif : le plaisir et l’envie n’y étaient pas. Ou peu.

 

Film de la course : départ 4h du mat’ de Langevin dans de bonnes dispositions physiques mais sans grande envie de mordre. Juste la curiosité de savoir si cela va passer. Si à cet instant j’avais eu la réponse, je crois que j’aurai pu retourner me coucher tranquillement. Pas d’excitation, mais content quand même de pouvoir être là. Un départ prudent, concentré, plutôt au fond comme cela m’avait réussi sur le Caldeira Trail. Petit rythme de nuit sur la route de Grand Galet. Les A2R sont devant, en groupe. Je ne veux pas prendre le risque d’un train au dessus de mes pompes. Il fait bon. Je suis serein. Le peloton est déjà très étalé sur le bitume qui grimpe assez régulièrement. 1er ravito au village de Grand Galet et surprise : tout le groupe A2R est là. Sauf Seb, évidemment. Je ne m’attendais pas à les revoir avant le mur à venir. Je les laisse derrière en me disant qu’ils reviendront bien dans la descente vers Mare à Boue. Je fais mon train en dedans, au cul d’un petit groupe de quatre que je pensais faciles aussi, mais qui vont sauter les un après les autres. Tant et si bien que je me retrouve isolé, en chasse-patate du paquet précédent, dans le final du fameux mur qui serpente vers la Plaine des Sables. Ce sera LE temps fort de cette journée. Juste somptueux : Lever de soleil sur Langevin, ciel bleu intense, Plaine des Sables ocre rouge avec d’immenses étendues givrées blanches. « Tout individu collabore à l’ensemble du cosmos », l’esprit nietzschien fait irruption dans mes pensées en voyant ces dizaines de petites fourmis en file espacée, d’une foulée en apesanteur lunaire, et toutes attirées dans la même direction. Dans ma tête résonnent les caisses et les cuivres des premières mesures du  Zarathoustra  de Richard Strauss. Instants hors du temps, irréels et magiques. Pointage et ravito VIP avec Marcelle Puy à la soupe. La caisse est bien là, mais apparaît une petite gêne aux adducteurs qui ne sont plus habitués à ce genre de figure de style. Rien d’alarmant. Direction Textor via l’Oratoire. De l’archi-connu. Et ce sera bien là un élément problématique de l’équation jusqu’à la fin : Plus de surprise positive, plus de découverte. Des sections tellement rabâchées qu’elles en deviennent mentalement longues et fastidieuses dans un tempo quasiment couru d’avance. Je rattrape Bernard qui lui aussi se teste au sortir d’une blessure du dos. 

 

Textor ! Textor ! 10 minutes d’arrêt ! Stand A2R : Vincent est là avec une chaise pliante et son sourire tranche papaye. Un sans faute : Calme, disponible,  prévenant. Le top ! Changement de chaussettes, le plein, la bise et zou ; prochain arrêt Mare à boue. Seb est déjà plus d’une demi-heure devant, et le reste du team A2R devrait me débouler dessus dans les hectomètres à venir. La descente pour une fois est propre, à peu près sèche. Pas de piège. Je peux la dérouler sans jurer tous les 50 mètres.  Cela ne doit pas être trop mal car seulement trois ou quatre bougres me repassent tranquillement. Je pointe à Mare à Boue à 11h avec 50 minutes d’avance sur le plan de vol 24h. Pas d’A2riens en vue.  J’y accroche alors une petite source de motivation : « ‘me rattraperont pas ! ». Du coup, je décide de faire mon effort dans la longue montée vers le Bloc pour maximiser l’écart avant la descente dans laquelle je sais que je vais perdre beaucoup. La première heure d’ascension est bien rythmée avec de franches relances. Mais la lassitude commence à gagner passé Kerveguen. Un coup de moins bien, un peu frisquet aussi, et aussitôt arrivent les pensées négatives : « sentier de merde », « même pas la moitié et déjà marre… ». Je m’enfile un petit gel qui remet du sucre dans la machine, ça aide. Aucune erreur  d’alimentation sur ce raid, le métier. Ce pierrier jusqu’au gîte du Piton est interminable et la visualisation mentale de la descente à suivre accentue mon humeur grognasse.  Justement la voilà : La salope ! La connaître par cœur n’est plus un avantage car chaque épingle franchie signifie toutes celles qu’il reste. Et après dix heures de rando le posé de pied est nettement moins dynamique. C’est à ce moment que je constate, non sans amertume, que le plaisir intrinsèque à ce genre de balade avec dossard n’y est plus trop. J’y suis sans y être. Il n’y a plus rien à prouver et dans ces conditions l’inconfort l’emporte sur la motivation. Trop long mentalement. Par habitude, je prends mes maux en patience et désescalade cahin-caha cette paroi avec résignation et désenchantement.

 

Cilaos, 15h30. Plus qu’une demi-heure d’avance dans le plan de vol 24h. Pour la première fois je jette un œil sur le pointage : 70ème un bout. Correct. 2ème stand A2R avec la dream-team de l’assistance : Mauricette et Jean-Louis. Prise en charge totale. Rien à faire ni penser sinon à manger quelques pâtes collantes et tiédasses au beurre et au sel. Le corps n’est finalement pas si mal. Ce sont les genoux qui grincent le plus et les quadris sont logiquement un peu cramés. Pour le reste, à commencer par le dos, ça passe ! Le moral quant à lui se stabilise dans un gris neutre car je sais que le plus dur est derrière, mais que  nana enkor pou fé comme dit créole. Seb m’est annoncé environ deux heures devant ! Cela m’émouvrait presque… 15 minutes plus tard, au moment pile où je lève mon cul de la chaise pour repartir, vl’a le Jo et sa paire… de bâtons ! Je n’y pensais plus (ou presque). Le reste de la troupe A2R est plus loin. Le scénario est simple : je suis convaincu qu’il va abréger son ravito pour essayer de minimiser l’écart dans la montée du Taïbit,  me choper vers Roche Plate ou Orangers pour au final me déposer sur la canalisation. Il a, sur le papier, bien plus de vitesse que moi sur le plat et la descente finale.

 

Pourtant je repars sans précipitation. La section de Bras Rouge est une vraie purge au niveau du mental car la route me nargue en face et c’est une heure de plus qui me semble inutile. Je repasse, pour la première fois en course, à l’endroit où j’avais failli faire le grand plongeon sur le GR2008. Séquence frisson.  Sur la route, au pied du Taïbit, deux concurrents épuisés ne s’imaginent pas rentrer dans Mafate et préfèrent jeter l’éponge. Souvenirs. Je connais ce col marche par marche, presque caillou par caillou. Nous nous aimons bien. J’adopte d’emblée un rythme assez conservateur en prévision de l'inévitable « bagarre » à venir avec le Jo. A mi-pente la nuit me rattrape et j’allume, curieux, la nouvelle frontale toute belle que j’ai.  Ouf ! Les phares de ma bagnole éclairent moins bien ! Z’ont progressés chez Petzl. La nuit est belle et dans l’effort ne me semble pas si fraîche. J’avais, à Cilaos, fais le choix un peu risqué de repartir en short et tee-shirt, un bonnet sur la tête et le coupe-vent dans le sac. Un peu juste au vent mais largement passable. 1h40’ depuis la route. Rien d’extatique mais cela me convient car je bascule dans Mafate avec le cardio bien en ligne et encore un peu de jus dans les guibolles.  Au franchir du col, la motivation revient instantanément et je repense en positif. En fait, le tempo psychologique est exactement similaire au GR2007 : ça sent l’écurie ! Et la nuit, si tous les chats sont gris, moi, je passe tous les clignotants au vert. Ce n’est pas la première fois et je n’ai pas vraiment d’explication. Biorythme circadien ? Ambiance feutrée qui éloigne la pression ? Fraîcheur bienfaitrice ? Je ne sais, mais la confiance est à son maximum.  Pourtant il reste encore 40 bornes et tout peut basculer.

 

Marla, 19h.  Presque une heure de rab dans mon plan 24h. Je ne m’en réjouis pas plus que cela car j’appréhende quand même un grosse baisse de régime sur la canalisation et cette petite marge risque de fondre en moins de deux. Pas le temps d’avaler la soupe avec les trois autres coureurs posés là, que le Jo déboule comme un chien dans un jeu de quilles et bâtons en mains. Bigre ! Je ne l’attendais pas si tôt. Vu qu’il n’est pas un énorme grimpeur, je me dis qu’il a du se retourner la tronche dans le Taïbit pour ne pas perdre le contact. Une heure plus tôt une telle arrivée inopinée m’aurait sans doute définitivement ruiné le moral. A cet instant, elle m’a remonté comme une pendule. Ni une ni deux, je remplis mes gourdes et plante cavalièrement le Jo devant le robinet de flotte d’un « à tout suite », tellement persuadé qu’il allait me dévorer ces trente secondes chapardées dès les premiers rondins de  la descente vers Trois RochesS’engage alors une longue séquence assez rocambolesque intitulée « Le Jo aux trousses ». Constatant que la machine semblait disposée à flamber me voilà en prise de risque totale et jouer « tapis ». Grosse descente et allure footing jusqu’à Trois Roches. Conséquence : je passe en mode Pac-Man et commence à gloutonner des fantômes de coureurs. En me retournant régulièrement je vois une frontale qui me suit à 2 ou 3 minutes maxi : Le Jo !!! J’envoie tout le pâté qui reste sans compter la mesure dans les trois raidards menant au contrôle-ravito de Roche Plate. Dans la courte descente je rattrape Isabelle que je n’avais pas vue au départ et qui accuse un très grand coup de moins bien : hypoglycémie ? Moralité : je décide quand même de prendre le temps de bien ravitailler et de me poser à Roche Plate pour m’alimenter sagement. A peine trois minutes et v’la le Jo qui déboule bras dessus bras dessous avec l’Isabelle. « T’as pas de la crème ? » qu’il me demande. « De la vaseline » que je lui tends d’une main, agrippant mon gobelet en plastoc de soupe tiède de l’autre. Et le vl’a qui baisse son froc pour s’en tartiner les valseuses sous le regard éteint d’Isabelle affalée sur une chaise de jardin.  Je n’attends pas la fin de la cérémonie pour filer à l’anglaise. Je calcule qu’il va se repointer dans la descente des Orangers et ce sera mano a mano sur la canalisation… jusqu'à ce que je saute.

 

C’est fou comme l’esprit commande le corps. On a beau le savoir, c’est toujours une révélation quasi mystique que de l’expérimenter sur son propre organisme. Des limites et des douleurs qui semblaient infranchissables sont balayées d’un revers par quelques giclées d’adrénaline envoyées d’un cerveau sans doute trop orgueilleux. J’enquille la courte montée vers La Brèche avec lucidité et enchaîne la descente sur les Orangers. Étonnamment le pied est assez sûr et trouve des appuis stables. A Cilaos, j’ai troqué les Montrails® Masochist© (sic !) pour des Raidlight® complètement neuves ! Très gros risque, mais payant : un vrai chausson et un excellent amorti sans compromis sur le contrôle. J’avale la courte rampe qui mène à l’îlet, côté école. En regardant vers le fond de la gorge je ne vois aucune lumière. Il doit donc être à plus de cinq minutes. Une gentille dame frigorifiée tient toute seule le ravito-pointage et me sert une soupe épaisse et froide que j’engloutis debout. Le plein des bidons et je redécolle en moins de 3-4 minutes.  Pas de Jo !

 

Aïe ! Dans le reste de pente qui débouche sur la canalisation des Orangers, mon releveur droit se réveille très violemment. Cela fait pourtant déjà quelques heures qu’il envoyait des petits signaux que j’ai méprisés. Je grimace, cela n’annonce rien de bon. Nous y voilà : douze bornes de faux plat pour arriver au petit réservoir avant la descente finale. Je propose d’adopter une course autour de 8,5 km/h. Le cardio répond présent. Les jambes râlent un peu mais après négociation serrée acceptent de suivre. Las ! Le pied droit n’est pas du tout solidaire. A trois reprises il butte dans des caillasses, manquant de me faire valdinguer. Et comme il y a juste une marche de 300 mètres à droite… on se calme. C’est sûr, dans ces conditions, Jo va me déposer. Bah tant pis ! C’est la course... Je regarde le chrono et il me reste plus de 4 heures pour boucler dans le plan 24. Ça par contre, c’est gagné ! Le spot de lumière se rapproche inexorablement en sautillant : Il court ! Moi je ne peux faire mieux qu’une marche rapide, peut-être 6 ou 6,5 km/h.  Ce n’est pas si mal, j’ai le sentiment de limiter la casse au mieux. Au niveau du tunnel, Jo est juste en face, de l’autre coté de la ravine, c’est-à-dire revenu à moins d’une minute. Il va faire la jonction. Je continue mon petit train et dix minutes plus tard, toujours pas de Jo dans les pattes. Par contre je continue à gloutonner quelques fantômes. Du coup, lorsque je me retourne il y a à chaque fois 3 ou 4 frontales dans le kilomètre arrière. Mais quelle est celle du Jo ?  Je finis par boucler cette satanée canalisation en 2 heures pile-poil. J’y ai repris une petite dizaine de places. Maintenant faut rien lâcher. J’y crois et je suis gonflé à bloc. J’ai compris que le Jo avait lâché l’affaire. Il ne reviendra plus. Je dévale tant bien que mal sur Sans-Souci. Dernier pointage, un verre de Coca™ et c’est parti pour les sept derniers kms dont cinq de bitume. Une bénédiction : ça tape fort, mais pas de caillasse pour trébucher. Je déroule à 10 km/h  les 300 derniers mètres de dénivelé négatif. Me voilà rendu au carrefour où j’avais jardiné dix bonnes minutes lors de l’édition 2010 sans jamais trouver l’entrée du sentier. Cette fois le balisage est nickel et en moins de deux je barbotte dans la Rivière des Galets. C’est sûr, c’est mieux que le détour par la route que je m’étais tapé il y a deux ans. Je jette un œil dans la pente que je viens de dévaler. Pas de lampe. Un autre sur le chrono : C’est jouable pour 22h30 de course. 

 

Délivrance et plénitude. Moment où l’on se sent invulnérable. Ou simplement immortel. Sans doute telle est la véritable quête : ces quelques minutes sont le Saint Graal qui justifie tout le chemin.  Je cours sur la piste puis la digue comme pour un dix kilomètres. Les projecteurs de lumière du stade m’attirent tel un papillon de nuit et je franchis la ligne à 2h25 du matin. Jo, 23 minutes plus tard.

 

Seb fini 12ème, à peine 4h30 devant. Le reste de la bande A2R a préféré attendre l’heure du p’tit dej’ sachant sans doute qu’il n’y avait que des petites brioches (sans confiture) et des oranges au buffet de l’arrivée.

 


 Sentiments mitigés donc, et toujours le même constat final  assez dérangeant : à travers les expériences physiques et psychiques que procurent ces balades, le désir de vérité absolue sur soi-même se heurte à notre incapacité à accepter notre condition de mortel. Ne nous suffit-t-il donc pas de nous arranger avec la réalité ? « Les vérités sont des illusions dont on a oublié qu'elles le sont ». Pour Nietzsche l'illusion n'est pas le contraire de la vérité. Elle est la vérité telle que nous pouvons l'accepter. Tout en étant capable d'y renoncer.

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13 mars 2012 2 13 /03 /mars /2012 06:29

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Arrivé à la Réunion en fin 2008, ne connaissant rien à la montagne et rechignant à faire plus d'un tour de terrain de rugby pour l'échauffement, je me retrouve à faire un canyon avec le grand Steph qui me parle de A2R. Quelques semaines plus tard, accompagné de piliers da l'asso, je me retrouve à faire une grande balade en montagne (14h et des ongles en moins).
Le virus est attrapé. D'ailleurs 6 mois plus tard, je ferais mon premier Grand raid 

avatar-Piton-Anchaing.jpg

Depuis, j'ai élargie mes activités : canyon, escalade, vélo, natation.

Quelques courses : Trail Golf du Morbihan, 974 Réunion, 2 Grand Raid Réunion, Tor des géants en préparation

 

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13 mars 2012 2 13 /03 /mars /2012 06:00

Encore une drôle d'idée ....


Le principe est simple ... faire une boucle dos d'âne / Marla / dos d'âne sans passer par le même chemin (sauf la montée 2 bras dos d'âne).


Pour info, ça donne  7400 m de dénivelé cumulé 

 

Parcours : Dos d’âne, deux bras, rivière des galets, les Orangers, roche plate, Marla, la nouvelle, fond Mafate, bifurcation du Bronchard/roche plate, grand place, Cayenne, dos d’âne.

 

Quelques temps de passage : roche plate en 3h05, Marla en 4h59, La Nouvelle en 5h50.


Ceux qui ont essayé : 

Seb : Janv 2011 - 11h40 / Juil 2011 -  10h55

Ben : Juil 2011 - 10h52

Karine : 14h (à vérifier)

Régis, Vincent : à venir 

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17 juillet 2011 7 17 /07 /juillet /2011 15:49

Cette année, voilà que mes baskets se dirigent vers l’Himalaya, le Népal et ses fabuleux sommets.

 

Nous sommes un groupe de 10 réunionnais à nous lancer dans l’aventure : le tour des Annapurnas en 12 étapes dont 8 de course, ce qui nous fera parcourir 350km et 13000m dénivelé. C’est un circuit classique du Népal, nous irons juste un peu plus vite que les randonneurs ordinaires.

Le principe est d’être en autonomie en matériel. Le couchage est assuré en gîte, et nous sommes nourris le matin et le soir. Pour le reste, chacun se débrouille.

 

La grosse inconnue, c’est l’altitude et les passages au-dessus de 4000m. On ne sait pas à l’avance dans quel état on sera.

 

Départ de la Réunion le 20 avril pour Bangkok, où nous ferons escale 24h. Histoire de rendre visite à quelques Bouddhas dans les nombreux temples qui parsèment la ville. J’ai hâte d’être au Népal, Bangkok, je connais déjà.

 

Nous reprenons l’avion le 22 avril pour Katmandou, les choses sérieuses se rapprochent. On aperçoit au loin le sommet de l’Everest qui dépasse des nuages, il est à la même hauteur que nous. Waouh ! Puis nous survolons la région de Katmandou, des petite montagnes très pentues, avec les maisons au sommet, et couvertes de cultures en terrasse. C’est très inhabituel.

 

Arrivée à Katmandou. Nous y sommes un jour avant le reste du groupe qui arrive de métropole.

 

Je me retrouve en Inde. Les saris, les odeurs, les vaches, la circulation au klaxon, la saleté, les gens qui crachent. Je ne m’y attendais pas. C'est tout de même moins prononcé qu'en Inde. Mais rien de bouddhiste là-dedans. En fait les bouddhistes sont dans les montagnes.

 

Katmandou est à 1300m d'altitude, il y fait chaud, sans excès. Nous sommes dans un bon hôtel. Nous sommes 3 dans la chambre, avec Delphine et Morgane qui est là depuis quelques jours. Je suis partie sur les plus hautes montagnes du monde avec une tendinite au genou, qui est vivace en montant les marches. Je monte les escaliers sur une jambe pour ménager mon genou.

 

Le lendemain nous avons une journée complète à Katmandou. C’est l’occasion de se balader dans le quartier de Tamel, touristique et commerçant. On y trouve tout pour la montagne. La vieille ville regorge de temples, mélange d’hindouisme et de bouddhisme. Dans la banlieue, le temple bouddhiste de Bodnath dresse son stupa, le plus haut du monde, au-dessus des « yeux de Bouddha », entourés des monastères des réfugiés tibétains. Non loin, se trouve le temple de Pashpati, hindou, avec les ghats crématoires de la région.

 

Le soir, les métropolitains nous rejoignent. Et les coureurs népalais le lendemain. Le groupe est maintenant au complet, pour le contrôle des sacs. Et le contrôle médical.briefing1

 

Nous sommes 28 au total : 5 népalais dont une fille, 8 réunionnais, 4 de l'organisation et coureurs, passionnés du Népal, un suisse, un gars de Toulouse, Maud ex réunionnaise et Morgane de Chamonix. 6 marcheurs complètent le groupe, dont 2 réunionnaises. Ca fait 5 coureuses : Maud, Yangdi, Morgane, Maryse la médecin et moi. Les marcheurs font le même parcours que nous, mais ils ont le droit à un porteur, ce qui fait une grosse différence en altitude. Alors que les coureurs trimbalent toutes leurs affaires. Le poids du sac est donc un élément important, sachant qu’on a besoin de vêtements chauds, étanches, et d’un sac de couchage. Le mien doit faire dans les 6kg.

 

Déjà certains se tapent des dérangements gastriques, dont mes 2 coturnes. Ca défile la nuit, pendant que je dors à points fermés. Je ne suis pas sujette aux problèmes digestifs et j’y échapperai de tout le séjour.

 

Le lendemain matin, 25 avril, c’est le départ en avion pour Pokhara, au pied du massif des Annapurnas. Enfin les choses sérieuses ! En tenue de course, car nous enchaînons directement sur un court trajet en bus qui nous dépose au pied du chemin. On attaque la partie marche d'approche et d’acclimatation. Pour ça, le parcours est très bien fait. Le chemin est surprenant. Entièrement pavé de grosses dalles. Ce sera comme ça pour tous les chemins qui relient des villages, qui sont en fait les "routes", très utilisées par la population et les animaux de bât. On peut prendre notre temps, regarder les petites fleurs et les jolis papillons. Je ménage toujours mon genou en montant les marches sur une jambe, ce qui ne me fait pas aller bien vite. Car les marches sont une spécialité des chemins népalais. C'était bien là ma crainte. Nous cheminons à flanc de montagne, traversant quelques villages tout en pierre et les champs en terrasse, cultivés avec des buffles. Voici la traversée du premier torrent, premier pont suspendu. Les vallées sont très profondes.pont suspendu

 On termine par la montée sur le village de Ghandrung, à 2000m d'altitude. On commence à rencontrer les premiers convois de mules, bien chargées. Attention, elles sont prioritaires, car bien larges. Surtout celles qui transportent les bouteilles de gaz. Je double un monsieur avec une petite fille toute blonde qui visiblement n'a plus envie d'avancer. Elle me redoublera en pleine montée un peu plus loin... confortablement installée dans un panier dans le dos d'un porteur. Les porteurs sont impressionnants. Ils transportent de grands paniers accrochés à leur front. La charge moyenne des nôtres est de 25kg. On en croise qui portent beaucoup plus lourds. Nos porteurs portent les affaires des marcheurs et les affaires de l'organisation, en particulier la pharmacie et le caisson de recompression.

 

Notre gîte du soir est luxueux. Petites chambres avec salle de bain et eau chaude. Nous avons même des toilettes européennes. Après, ce sera des toilettes turques, avec la douche dans la même pièce, sans bac, l'écoulement de la douche étant les toilettes. Dans les gîtes, nous aurons toujours du thé à volonté, ce qui me va très bien. Les autres commencent une cure de bière, certains même une grosse cure. Premier repas du soir en gîte : soupe, et riz-lentilles. Je me régale et ne m'en lasserai pas.

 

Puis les habitants du village nous offrent une soirée de danses traditionnelles. Ce sont les femmes qui chantent et une qui danse. Nous sommes bien sûr invités à danser aussi. Notre trio de réunionnais adaptent le maloya à la musique locale. Succès garanti.

 

Petit déj au gîte. Nous aurons toujours un régime porridge local, souvent à base de riz, du pain local délicieux ou toasts, et des oeufs. Le tout à volonté.

 

Deuxième jour de marche. On attaque en montée vers un col, où est perché un village. Les villages sont souvent dans des endroits incroyables. Je clopine toujours dans les marches. Puis c'est une bonne descente vers un torrent. Il n'est pas très large, ce sera un pont de bois cette fois-ci, quelque planches au-dessus des flots. Nous sommes au printemps, c'est la fonte des neiges, les torrents sont bien fournis.

 

On entame maintenant la remontée de la vallée vers le camp de base des Annapurnas, où sera donné le départ de la course dans 2 jours.

 

Ca monte donc, tout d'abord vers le village de Chomrong. C'est un village étonnant. On y arrive par le haut, les maisons s'étalent de-ci de-là sur tout le flanc de la colline en descendant, avec une pente abrupte, sur 800m de dénivelé. La "rue" principale est un immense escalier. Les champs sont dans la partie basse. C'est très beau. J'y fais une halte petit creux en dévorant une énorme part de délicieuse tarte aux pommes. En bas du village, après la traversée d'un torrent, on reprend la montée de la vallée. Les cultures sont toujours en terrasse, caractéristiques du paysage.

 

On entre dans une zone de forêt, où se baladent quelques singes. Ils sont grands et blancs. On croise toujours des mules, et même un cavalier, avec une selle recouverte de superbes tapis mutilcolores. Son petit cheval a le pied bien sûr. En France, on dit qu'un cheval ne peut pas monter des marches. Au Népal, ils peuvent.

 

Ah, voici la DDE au boulot. Les hommes refond une partie du chemin, des marches avec des énormes dalles de pierre qu'ils taillent sur place. Le tout à la main évidemment.

 

On commence à voir de la neige de l'autre côté de la vallée. En arrivant de la Réunion, c'est toujours une joie. Puis le Machapuchare apparaît devant. Quelle majesté ! Un pic de 7000m ! Sa forme est caractéristique. C'est un des sommets jamais gravi, très vertical, et surtout sacré pour les népalais, donc interdit.

 

Pour la rando ou l'alpinisme, il faut des permis. Nous n'aurons jamais besoin de présenter les nôtres, nos dossards en font foi, consigne mise en place par l'organisation avec les autorités locales.

 

C'est l'arrivée en début d'après-midi au minuscule village de Dobhan. Nous sommes maintenant à 2500m d'altitude.montagne3

 

Ce soir nous avons le choix entre douche froide et chaude payante. Il fait beau et encore chaud, la douche froide me suffit. Douche est un bien grand mot, c'est un seau d'eau. Je rince mes vêtements, mais ils ne seront pas secs le lendemain matin. Ils finiront de sécher sur moi et sur le sac pour les chaussettes.

 

Je fais les 2 premiers jours en short, habituée au soleil tropical. Après je serai en long jusqu'au bout. D'ailleurs Morgane, qui prendra des coups de soleil, adoptera après mon modèle quand elle se sera rendue compte qu'on n'a pas plus chaud et qu'on est mieux protégé. On commence à manger à n'importe quelle heure, quand on arrive au gîte. Ce sera comme ça jusqu'à la fin.

 

On attaque le troisième jour de marche, vers le camp de base du Machapuchare, à 3700m d'altitude. Je décide de faire fi de mon genou, de toute façon, demain commence la course et mal ou pas mal, je n’aurai plus d’état d’âme. C'est bien passé, je ne sens presque plus rien, j'en suis soulagée.

 

On a intérêt à monter le plus lentement possible pour s'acclimater. Avec mes 2 jambes, j'arrive à midi au camp de base. On commence à traverser quelques névés sur le chemin. Avec le Machapuchare qui domine en face. C'est impressionnant.

 

A 3000m, on a traversé le village de Bambou. Un village au sommet du Piton des Neiges ! Plus haut, il y a encore de la végétation basse. Devant un petit terrier se tient un espèce de petit "rat", mais sans queue. Il paraît que c'est un lapin, mais il a les oreilles rondes. Il y a aussi plein de petites fleurs, ça sent le printemps, notamment des toutes petites primevères.

 

Il n'y a plus de bouteilles d'eau dans les gîtes maintenant. Les mules ne daignent pas monter de l'eau si haut. Il faut la purifier avec nos petites pastilles. J'ai de l'aquatabs, il faut 1/2h d'action, et ça n'a pas de goût. C'est parfait. Ceux qui ont du Micropur doivent attendre 1h et ça a un fort goût de chlore.

 

Le camp de base du Machapuchare est juste un gîte, il n'y a pas de village à cette altitude. Il fait beau, et même chaud en plein soleil, il est midi. Je continue jusqu'au camp de base des Annarpurnas, à 1h de marche et 4200m d'altitude, impec pour l'acclimatation. 1h de marche et de plus en plus de neige. On arrive au pied des moraines, juste en face des glaciers, entourés des Annapurnas sud, II et III, et du Machapuchare derrière. Et d'autres sommets, tous à plus de 6000m. Les sommets commencent à être ennuagés. C'est très minéral au pied des glaces. C'est absolument splendide. J'y reste bien 1h, béatement assise sur un caillou en face de ce spectacle. On entend les glaciers qui craquent et les pierres qui dégringolent. Dans les moraines, c'est la couleur gris qui prédomine, avant le blanc étincelant des glaciers. Magnifique.

 

Je reviens au camp de base du Machapuchare. On a tout l'après-midi pour continuer à profiter du spectacle. Maryse la médecin me propose de la mésothérapie pour mon genou. Pourquoi pas, je n'ai rien à perdre et c'est une sécurité. Elle fait aussi un contrôle systématique de la saturation en oxygène du sang et du rythme cardiaque. Je suis passée de 98 à 84% en oxygène et 56 à 68 pulsations/mn. Ma saturation est basse, en France, on hospitalise à 80%. Mais je me sens bien.

 

Je fais une petite sieste, ce qui n'est pas dans mes habitudes. Au réveil, je ressens soudain une envie de vomir. C'est un des symptôme du mal des montagnes. Je sors 1/4h dehors, on ne sait jamais si ça se matérialise... Ca passe, et je ne serai plus embêtée avec ça. Je ne suis pas la seule, il commence à y avoir pas mal de mal de tête.

 

Demain c'est le début de la course, du camp de base des Annapurnas. On y monte sans chrono. Avec ma préparation légère ce dernier mois à cause de mon genou, je suis bien contente d'avoir eu 3 jours de marche pour me préparer. Demain on part à 5h du gîte pour un départ donné à 7h en haut. Difficile de dormir cette nuit. C'est l'effet de l'altitude. Pourtant nous ne sommes pas encore si haut que ça. Mais nous sommes tous à la même enseigne.

 

Départ à 5h aux premières lueurs du jour pour rejoindre le camp de base des Annapurnas. Comment faut-il s'habiller ? Il ne fait pas si froid que ça. Je mets en bas collant + surpantalon, et en haut maillot + veste coupe-vent, + bonnet et gants. Ce qui fait que je ne suis pas si chaudement vêtue que ça.

La veille à midi, la neige fondait, ce matin c'est gelé.

 

Le temps est très beau là-haut, tous les sommets sont dégagés. Mais on prend moins le temps de les admirer que la veille. Je me déshabille et je range mes bâtons, et nous voilà sur la ligne de départ. J'utilise mes bâtons en montée et sur le plat, pas en descente. Car nous allons redescendre dans la journée ce que nous avons monté en 3 jours, 42km.départ3

 

Après une petite séance photos, nous voilà partis. Dans la neige. C'est d'abord un faux plat montant, pas long, peut-être 200m. Un premier groupe part vite, je suis dans le deuxième qui trottine, derrière ça marche. Je n'ai pas trottiné longtemps. Impossible de courir 200m en montée, c'est l'essoufflement immédiat, nous sommes à 4200m, je rappelle. Donc je passe illico à la marche, et reprends la course dès que la descente s'amorce. Ah, ça va mieux.

 

En 1/2h j'arrive au camp de base du Machapuchare, après des successions de zone de neige et de pas neige. Puis c'est la descente vers Chomrung, d'abord par le sentier, puis la "route népalaise" de dalles empierrées, avec moultes marches, et quelques montées de temps en temps. Eric me suit, il me demande s'il peut rester juste derrière moi. OK. 5mn plus tard, je me retourne, il n'est plus là. Et bien Eric, qu’est-ce qu’il t’arrive ? Il a décroché. Je continue mon bonhomme de chemin, en faisant le plein d'eau avec les petites pastilles de désinfection, en recroisant les "agents de la DDE", et tous les marcheurs qui nous encouragent sympatiquement. Pour ne pas se tromper de langue, on lance un cordial "namasté" à tout le monde, que Dieu te garde. Les népalais qui transportent des énormes planches de bois me laissent le chemin, alors que c'est plutôt à moi de les laisser passer vu leur chargement. Ils portent les planches en travers du chemin, et quand il n'y a pas la place, ils marchent en crabe avec les planches dans le sens du chemin. Impressionnant !

 

Me voilà arrivée à Chomrung, pas le bas cette fois-ci. Il me reste juste 800m de dénivelé et de marches à grimper pour passer le village. Je ressors mes bâtons et attaque à allure régulière. Tiens, je n'avais pas remarqué à l'aller, l'école est au milieu du village. Les montées et descentes quotidiennes des enfants sont équitablement réparties. Nous avons un pointage en haut de Chomrung, où on nous offre un khata, une écharpe de félicité.

 

La descente reprend. On quitte maintenant le trajet de l'aller pour longer le massif des Annapurns par le sud. On plonge vers le torrent, à passer sur un pont suspendu, nous sommes à 2000m d'altitude. Et voilà la dernière montée de 700m de dénivelé avant l'arrivée. Ca grimpe sérieusement. J'ai beaucoup de mal, je sens la faim, je machouille quelques trucs, mais ce n'est pas assez. Cette montée a été très dure. On traverse d'abord un paysage de champs en terrasses, avec quelques fermes très pauvres, qui contrastent avec les villages sur l'autre versant. Il n'y a pas âme qui vive. J'ai un sentiment de désolation. Et que c'est raide ! C'est vraiment pas après pas. A mi-montée, la pluie pointe son nez. Je me couvre. Plus haut c'est la forêt. La pluie cesse. Tiens, coucou les singes. Le point d'arrivée est le village de Tadopani, au col tout en haut. La montée n'en finit pas pour l'atteindre. Et puis, ça y est, les premières maisons apparaissent.  C'est le bonheur d'arriver, même si on ne doute pas d'y arriver, avec l'accueil des villageois et de ceux qui sont déjà là, dans la cour. Nous sommes en début d'après-midi, je n'ai pas noté mes temps, en moyenne 6h par jour. Je suis dixième et la troisième fille, Morgane est derrière. Elle ne tarde pas. Et Joël aussi, on est du même niveau à la Réunion. Et pas de problème de genoux aujourd'hui. Je prends vite la douche et me change, avant d'avoir froid. Et manger ! Vite, du riz !

 

La pluie revient. Dans la salle commune, il y a une épaisse couverture autour de la table, avec des braséros en dessous. Om met les vêtements à sécher autour. L'odeur des chaussettes embaume.

 

Je fais le plein de ravito pour le lendemain, des biscuits. On en trouve dans tous les gîtes. Les autres carburent plutôt aux barres chocolatées, moi je préfère les biscuits.

 

Les autres arrivent, progressivement dans l'après-midi. On se retrouve tous le soir au repas. Il y en a beaucoup qui ont eu le même coup de barre que moi dans la dernière et interminable montée de Tadopani.

 

Il y a eu 2 chutes au départ sur la neige, avec 2 entorses. Maryse est efficace, les 2 chevilles iront au bout.

 

Nous quittons Tadopani le lendemain en 2 groupes. Le premier est le plus lent, le second est le plus rapide, 1/2h plus tard. Je me retrouve dans le deuxième. On attaque par une côte, courte mais bonne, dans une très belle forêt, pleine de rhododendrons en fleur rouge vif. J'ai tout de suite beaucoup de mal, c'est mieux que la veille tout de même. Au point que je me retrouve rapidement la dernière des dernières. Avec Pemba, notre serre-file. C'est le frère de Dawa Sherpa, il est notre directeur de course et serre-file. Je peine tant que je peux, pendant que lui est très à l'aise à côté de moi. Gardons le moral. Il y a quelques maisons en haut de la côte, de la viande de boeuf sèche au soleil dans la cour.

 

Petite digression sur l'ethnie des sherpas. Leur nom de famille est toujours Sherpa, et leur prénom, c'est le jour de la semaine où ils sont nés, donc 7 prénoms possibles. Nous avons un Dawa Sherpa, un des coureurs, c'est le cousin de l'autre Dawa Sherpa, celui qu'on connaît. Ils sont originaires de la région de l'Everest, et sont considérés comme des ploucs par les gens des régions basses. Car il y a des régions basses au Népal, avec des rhinocéros.

 

Je suis maintenant sur une crête. J'en reste bouche bée. A droite s'élève la masse imposante du Daulaghiri, énorme, majestueux, et à gauche on surplombe la forêt fleurie de rouge. C'est l'une des vues qui m'a le plus impressionnée. Je cours bien maintenant, et je ne me lasse pas de lever le nez. Ah ce Daulaghiri !Daulaghiri1

 

Je rattrape les marcheuses, puis les derniers coureurs du premier groupe. Enfin des bonnes sensations dans les jambes. On arrive au village de Ghorepani.

 

Pourquoi j'ai eu tant de mal à monter ? Et bien justement, je ne sais pas.

Car arrivés à Ghorepani, nous avions un aller-retour vers le petit sommet de Poon Hill où la vue est merveilleuse sur le Daulaghiri, passant de 2800m à 3200m, tout en marches. Et là j'ai retrouvé mes ailes. J'ai doublé Joël, puis Eric, qui étaient de mon groupe. Comme c'est un aller-retour, j'ai croisé tous les autres, sauf le premier. Ouf,  je n'ai pas tant de retard que ça. Ah voilà les filles. Yangdi, talonnée par Maud, et pas loin Morgane. Je suis tout de même dans un autre wagon qu'elles. Morgane n'était pas sûre d'elle hier, car elle était malade les jours précédents. Maintenant, elle a retrouvé son punch. Mais moi, je ne sais pas ce qui m'est arrivé. La veille, je n'ai pas assez mangé, c'est sûr, mais le matin même ?

 

Le premier, c'est Sudip Raï, un jeune népalais. Comme son nom l'indique, il n'est pas sherpa, mais teraï, originaire de la partie basse du Népal, avec les rhinocéros, les bananes et les mangues.

 

Depuis Poon Hill, c'est la plongée vers la vallée de la Gandaki à 1200m d'altitude. Longue descente, de village en village, de convoi de mules en convoi de mules, parmi les champs, les vaches, les buffles. La forêt est finie, on ne la verra plus jusqu'à la fin.

 

Je rattrape René qui boit un coca en courant, ce qui n'est pas pratique. Il me redoublera un peu plus loin quand je fais le plein d'eau à un robinet. En fait dans les villages, il y a plein de robinets publics, où les gens viennent se laver et faire leur lessive. Le chemin pavé devient piste de 4x4, en construction. Ah, on rejoint la civilisation, mais la vie va changer dans les villages. Et moi je rejoins Thierry. Il a le moral en baisse par cette longue descente, il n'arrête pas de râler. On prend la piste ensemble. Il ne voit pas les raccourcis pour les piétons, qui évitent les lacets. Je suis sa providence, même si on en loupe quelques-uns.

 

Nous voici arrivés en bas. On rejoint une grande piste, fréquentée par des bus et des camions. La circulation n'est pas importante, mais poussiéreuse. On entame la remontée de la gorge de la Kali Gandaki, qui est étroite à cet endroit, donc tumultueuse. On y fait d'ailleurs du rafting. La piste est un faux plat montant, ce n'est pas ma tasse de thé. Thierry m'abandonne et part devant. Joël me rattrape. Nous marchons, mais il est beaucoup plus rapide que moi, au rythme de ses bâtons. Je me retrouve donc seule. J'arrive à Tatopani. Il y a des sources chaudes, et des piscines. C'est un gros village. Encore quelques km de piste, et c'est l'arrivée au village de Dana, à 1400m d'altitude. La piste ne traverse pas Dana, elle passe en "rocade". Si bien que la population, qui prend maintenant le bus, ne traverse plus le village, et il est en train de mourir.

 

A Dana, il fait chaud. On en profite pour rincer les fringues. Dans le jardin du gîte, on retrouve les mêmes plantes qu'à la Réunion, comme les bougainvilliers, et c'est aussi la vallée des pommes. Je déguste une super bonne tarte à la carotte. En Inde, il y a des desserts à la carotte.

 

Nous poursuivons le lendemain la remontée de la Kali Gandaki. La vallée va s'élargir progressivement. Il paraît que c'est la vallée la plus profonde du monde, profondément encaissée par rapport aux montagnes qui la bordent. On lève la tête, et c'est du 5000m d'altitude juste au-dessus.

 

Aujourd'hui nous allons jusqu'à Marpha, à 2600m, en partie par la piste, en partie par des sentiers, pour 34km, c'est une petite étape. On commence par un bout de piste, je suis rapidement larguée par tous ceux qui courent. On passe sur l'autre rive, pont suspendu évidemment, et ça bouge. Le sentier traverse plusieurs villages, délaissés par la piste donc par l'animation locale. Ca monte bien. Ah, je vois 2 dos oranges. On a des dossards oranges sur nos sacs. Je les rattrape. C'est Gaëtan, un marcheur qui est passé coureur tellement ça lui plaît, il grimpe bien, et Morgane. Qu'est-ce qui lui arrive à Morgane ? La même chose que moi la veille. Je les double à l'aise. C'est la descente vers le pont suivant, pour reprendre la piste. Morgane m'y rejoint. Elle s'est secouée pour m'accrocher, en en bavant. On fait route ensemble pendant une dizaine de km. C'est moi qui donne le rythme, alternant course et marche en fonction des descentes et montées. On arrive à un embranchement, on hésite, il n'y a rien sur la carte. Un 4x4 arrive, on l'arrête carrément pour demander la route. En fait les 2 chemins se rejoignent, c'est l'ancien et la nouvelle piste. Un sentier coupe quelques lacets et nous voici au village de Kalapani, tout en longueur le long de la rivière. Morgane s'arrête à l'entrée du village pour se ravitailler. Je continue, elle me rejoindra. Nous avons une vue magnifique sur l'Annapurna I, le plus haut, 8000m et le Tilicho Peak, 7000m, sur l'autre rive.

 

D'ailleurs on y passe, sur l'autre rive. Je fais le plein d'eau au village suivant, à un robinet public. Morgane me rejoint et elle part devant, je ne peux pas la suivre. En tout cas, elle est requinquée.

 

Le lit de la rivière s'élargit, jusqu'à devenir même très large, plein de sable et de cailloux tout gris. Comme il n'y a pas de forêt de ce côté-ci, le paysage devient très minéral, bien qu'il y ait des zones cultivées vertes plus haut. La vallée devient vraiment imposante. On la retraverse rapidement, pour se retaper un long morceau de piste. Je pensais que cette partie serait monotone, pas du tout, c'est tellement beau. Il y a des endroits où on peut couper les méandres de la piste dans le fond du lit de la rivière, avec quelques passages à gué. Je n'arrête pas de voir un camion orange, en fait, nous allons à la même vitesse ! Avec poussière à chaque fois. Au dernier "raccourci" dans la rivière, je suis les traces de 4x4. Fatale erreur. Les 4x4 traversent la rivière, trop profonde à cet endroit pour qu'il y ait un passage avec des pierres pour les piétons. Je peste en enlevant mes chaussures, et rebelote peu après. Je vois que le sentier fait un petit détour en hauteur pour éviter ce contre-temps. Trop tard.

 

Voici Marpha, c'est un gros village, il est plus en forme de bourg qu'étalé le long de la rivière. C'est un très beau village, les maisons sont tout en pierres, avec des toits en terrasse où le bois est stocké tout autour. C'est très étrange.Marpha1

 

En arrivant, on mange, on rince les vêtements, le rituel. J'arrive peu après Morgane qui est en train de s'enfiler un steak de yack. J'ai bien envie d'y goûter, mais c'était le dernier, j'arrive trop tard. Marpha est très touristique, il y a plein de boutiques d'artisanat, en fait pas local car tibétain. En effet, il y a un village de réfugiés tibétains juste à côté. Du coup l'après-midi, au lieu d'être ensemble au gîte, chacun s'éparpille pour le shopping. Je préfère le monastère, qui surplombe le village. La vue est splendide, avec tous ces toits plats bordées de branches, et le Tilicho Peak en face. On ne voit plus l'Annapurna I.

 

Prochaine étape : Muktinath, à 3800m d'altitude. De la hauteur, youpi !

Les coureurs népalais courent en fractionné en montée. Du genre 500m à fond, puis marche, puis rebelote. Ca leur réussit bien. Personne ne suit leur rythme. Leur participation à la course est prise en charge par l'organisation.

 

Pour boire, je prends 1l d'eau dans la poche à eau et 1/4l de thé sucré ou non dans chaque bidon, ça dépend des jours. J'aurai bien aimé ne pas utiliser la poche, mais je n'arrive pas à boire correctement avec les bidons et les bâtons en main.

 

Départ donc pour Muktinath. On part en 2 groupes ce matin. On poursuit la piste vers Jomoson, la préfecture du Mustang. Qui ressemble à une toute petite ville, avec un petit aéroport et une caserne de l'armée. Particularité n°1 de Jomoson : elle s'étend des 2 côtés de la rivière. Particularité n°2 : le pont, axe central de la ville est en pierre, mais trop petit pour le passage des véhicules. Les pistes s'arrêtent donc chacune de chaque côté du pont, avec une gare routière de chaque côté pour les bus. Les voyageurs descendent du bus, traversent le pont à pied, et remontent dans un autre bus de l'autre côté. Idem pour les marchandises.

 

Kali Gandaki après JomosonSur la piste, je me retrouve invariablement la dernière, avec Pemba. A la sortie de Jomoson, je rejoins les marcheurs, Pemba m'abandonne pour rester avec eux. Je quitte la piste pour passer dans le lit de la rivière, toujours très large. J'y croise quelques yacks bien chargés. Mes premiers ! Erreur, ce ne sont pas des yacks, on est trop bas. Ce sont des vaches croisées avec des yacks. Elles sont petites, avec des longs poils. On rejoint la piste, avant de bifurquer dans une autre vallée perpendiculaire et secondaire, vers le village de Lupra. Il y a un panneau indicateur, tellement petit que j'ai failli le louper. Heureusement, la vallée elle, n'est pas loupable. Ca change de décor. Il n'y a pas de sentier, on progresse comme on peut entre les pierres. C'est l'ocre qui domine dans cette vallée, toujours très encaissée. On s'élève peu à peu. Je me sens complètement seule dans ces cailloux. Ah, voilà devant un groupe de dossards oranges. Je ne suis plus seule. Je m'en approche progressivement. Un pointeur est au pied du village de Lupra, qui est juste au-dessus, et par lequel nous sommes priés de faire un petit détour. Le village est minuscule et bien calmeLupra, à l'écart de toute voie de communication importante. On y pratique un bouddhisme particulier plus ancien que le bouddhisme tibétain, c'est le seul village népalais comme ça, et sans doute le seul au monde. Comme quoi il est bien isolé, il faut le vouloir pour y aller. Passé le village, on redescend dans la rivière, qu'on traverse. Les sommets enneigés sont devant moi. Je rejoins les dossards oranges, ce sont les coureurs du premier groupe. Je les dépasse en attaquant la montée pour sortir de cette vallée. Et quelle grimpette ! Très raide, qui nous mène de 3200m à 3900m, en lacets. Le paysage est austère, avec une herbe courte. Je grimpe, très régulière, au rythme de mes bâtons. Je double Alix. Puis Joël, puis René, qui s'écroule au bord du sentier. Surprise, un grand mur de pierres longe le sentier. C'est quoi ? Un grand enclos à bétail ? On monte, et on sent déjà qu'il y a moins d'oxygène. Et la neige en face se rapproche. Encore un dossard orange devant. J'arrive à un petit col, et sans réfléchir à la direction je rejoins le dossard orange, ils sont 2 en fait, Eric et Thierry. Nous sommes maintenant sur un sentier à flanc de colline, dominant la vallée de Muktinath. Elle semble sans fond vers la Kali Gandaki, dont elle est perpendiculaire. Elle s'étale à nos yeux, large, verte, avec des cultures en terrasses qui façonnent le paysage, et beaucoup de villages. C'est surprenant en venant de Lupra. Mais lequel est Muktinath ? Thierry est persuadé que nous avons loupé le chemin qui descend vers les villages. On sort la carte. Je m'en veux de ne pas avoir fait attention au col. Thierry veut descendre tout de suite vers la vallée, mais il n'y a pas de sentier. La végétation est rase, le terrain ondulé, c'est facile de descendre tout droit. Je conseille de continuer notre sentier, nous ne sommes pas encore assez au fond de la vallée par rapport aux sommets. OK, et on descendra là-bas, on distingue un sentier qui descend tout droit. muktinath3On le dévale à toute allure, jusqu'à ce qu'on arrive à un mur, enclos à bétail. On le longe, on descend encore. Voilà les premières fermes. On coupe tout droit en passant quelques murs de pierres, pas très orthodoxe tout ça. Le sol devient très humide, on a les pieds dans la flotte. Pas grave, on est arrivé. On entre dans le village en traversant les champs cultivés. Les garçons sont allés plus vite que moi, ils ont disparu dans le village. Je demande mon chemin : l'hôtel Mustang, terme de notre périple du jour. Non non, ici c'est le Plaza. Je vois bien que c'est le plaza, moi, je veux le Mustang. Non non. Je sors mon petit papier, c'est le Royal Mustang. Par là, vers le haut. OK. J'arrive à la sortie du village où je tombe sur mes 2 compères, ils ont fait le tout du village par inadvertance. Un gamin les accompagne. Ici c'est Jharkot, Muktinath c'est par là. Aaaaah ! Nous ne sommes pas dans le bon village ! Thierry est furieux, il faut remonter. C'est une grande piste. Plus loin une dame nous dit de prendre le chemin tout droit qui coupe. Ca grimpe. On arrive à un grand panneau : Muktinah : 1h. Thierry est désespéré. Allez les gars, tu vois cette grande maison rouge là-haut ? C'est un monastère, on demandera notre chemin. Je remonte le moral de notre petite troupe, et on grimpe. Que voit-on ? Quelqu'un qui nous fait des grands signes devant le monastère. Qui c'est ? Avec ma vue perçante, je ne reconnais personne de si loin. C'est Bruno, coureur (et organisateur). Bruno, on est perdu ! Mais non mais non, vous y êtes, l'hôtel est juste là. Le monastère n'en est pas un, c'est la première maison de Muktinath. Je cours dans la rue principale jusqu'à notre délivrance. Tout le monde est là, qui nous attend : René, Joël, tous ceux que j'ai doublés dans la montée...

 

Nous ne sommes pas les seuls à nous être fourvoyés à Jharkot, il y a quelques autres dépités. Nous étions sur le bon chemin, il suffisait de continuer tout droit pour tomber pile sur Muktinath. Peu importe, nous sommes arrivés à bon port, sans avoir à remonter tant que ça. Il n'y avait pas 1h depuis le panneau, mais 1/4h, à peine.

 

Maintenant place aux choses sérieuses : un bon steack de yack, bien mérité.

Ma chambre ce soir donne sur le toit en terrasse. Quelle vue ! La vallée sans fin vers l'aval, les sommets du Haut Mustang vers le Tibet avec le Daulaghiri tout au fond, les sommets enneigés tout proches vers l'amont, le Tilicho Peak, le Nilgiri. Nous sommes à 3800m d'altitude. Il fait beau, donc lessive. Surtout que demain, c'est "repos", journée d'acclimatation avant d'attaquer le Thorung La, le col le plus haut du monde (paraît-il.

 

Le seul hic, ma chambre est au 3° étage. La vue est belle, mais l'oxygène y est rare, quel essoufflement dans l'escalier ! Nous avons une grande salle de bain, avec des vraies toilettes. Juste quelques petits défauts d'eau. Pas grave.

 

L'après-midi, ce sera flânerie dans le village, très animé. Muktinath est le bout de la piste qui vient de Jomoson, les 4x4 s'arrêtent à l'entrée du village. Tout au long de la rue principale, il y a plein de népalaises qui tissent et qui vendent de l'artisanat, dehors. Je vais faire un tour au monastère en face de notre hôtel. Il est tout petit. Une vieille dame essaie de passer sous le porche, chargée d'un énorme fagot de branches épineuses sur son dos. A quoi ça sert les branches épineuses ? Mystère, mais elle ne passe pas sous le porche. Je l'aide à résoudre son problème logistique. Il y a un tout petit "hôpital", qui ressemble plus à un dispensaire. Et chez Bob Marley, une institution à Muktinath. C'est un hôtel rasta qui vaut le coup d'oeil et le coup d'oreille. Je retrouve aussi les vaches/yacks. Quelques coupures d'électricité le soir pour agrémenter la soirée. Des lampes à led sur batterie prennent le relais. C'est moderne, Muktinath !

 

Demain, c'est grasse matinée, et même à 3800m, on y dort bien. Au réveil, c'est l'explosion de beauté sur le toit en terrasse, quelle merveille. Ces sommets sont vraiment majestueux et impressionnants. Je profite au maximum du spectacle.Muktinath2

 

Pour notre journée d'acclimatation, Bruno propose une balade au-dessus de 4000m. Nous partons tranquillement derrière l'hôtel, vers les alpages. Nous montons jusqu'à une petite combe, aux pieds des glaciers. 4200m indiquent ceux qui ont un altimètre dans leur montre, c’est-à-dire tout le monde sauf moi. Je vais toujours au feeling. Bruno nous fait une séance photo, avec la chaîne de sommets enneigés en toile de fond. Quel décor ! On prend notre temps, on papote, on regarde les petites fleurs. Un gypaète nous survole, quelques yacks broutent en toute liberté.

 

Je redescends à l'hôtel. Dans la salle d'accueil, un groupe de népalais est absorbé par la télé (oui, il y a la télé !). Ben Laden est mort ! Du coup on regarde un peu, c'est en anglais. Impossible de se couper complètement de l'actualité. En tout cas pour la notion du temps, je ne sais absolument plus quel jour on est.

 

De nouveau une petite séance médicale. Ma saturatuion en oxygène est remontée à 94 et le rythme cardiaque a baissé à 58. Tout va bien.

 

Pour meubler l’après-midi, je suis le défilé des nombreux hindous qui débarquent des 4x4 vers le temple qui surplombe le village. Le temple est très connu. Le temple principal est hindouiste entouré de quelques autres bouddhistes, les 2 religions s'entendent bien. Les gens font des offrandes puis le tour du temple en actionnant les moulins à prière, bouddhistes. Oui vraiment, les 2 religions s'entendent bien. Derrière le temple, ils passent sous une centaine de douches d'eau sacrée, glacées, en priant. Puis ils se rhabillent, et redescendent prendre le 4x4 à Muktinath, purifiés.

 

Demain, on monte au col du Thorung, à 5400m. La montée est libre, en marche d'approche. Le chrono sera déclenché en haut, quand on veut, pour descendre à Manang à 3600m. Au briefing nous avons le droit à des consignes médicales particulières. En cas de symptôme du MAM (mal des montagnes), Doliprane si mal de tête, Diamox si autre symptôme et piqûre de célestine dans les fesses par le copain si vomissements. Et pas de chichi, on y va franco. Tout le monde a un kit complet avec la célestine. Pas moi. Il n'y a pas de seringue dans ma boîte, je n'ai pas le même que les autres. Tant pis, si j'en ai besoin, il n'y a qu'à espérer que le copain n'en ait pas besoin aussi.

 

Personne ne sait s'il va passer, même les népalais. C'est le suspens.

 

Thorung La : le must

Départ à 5h après une bonne nuit. Le temps est nuageux, il semble qu'il ait neigé sur les hauteurs, dans la demi-pénombre. Je pars avec Morgane. Au bout de 100m, la pluie pointe. On s'arrête pour se couvrir : doudoune, bonnet, surpantalon, la panoplie complète. On repart. C'est une fausse alerte, pas de pluie. Je ne peux pas avancer, impossible. J'étouffe, je manque d'air. La sensation est horrible, je deviens claustrophobe. Ca commence bien, je ne suis qu'à 3800m. Mais ce n'est pas possible, hier j'étais super bien. Je m'arrête de nouveau 200m plus loin, et je me déshabille. Je ne garde que le coupe-vent, le surpantalon et le bonnet. Je repars, ca va mieux. Non, pas tant que ça, j'ai comme la tête qui ne respire pas. Impression toujours fort désagréable. J'arrache le bonnet. Ah, ça y est, ça va. Je repars, seule et bonne dernière, mais ça n'a pas d'importance, sauf psychologiquement, ce n'est pas marrant.

 

Je monte vers le temple hindou, je le longe, puis l'inconnu s'amorce.

 

Nous sommes dans les alpages, avec quelques vaches. Le fond de la vallée se rétrécit, et la neige se rapproche. Le temps se dégage, chouette. Je monte doucement et régulièrement, il vaut mieux ne pas forcer. Et voilà que je rattrape les autres. J'ai pourtant l'impression d'aller doucement. Le terrain devient de plus en plus minéral, et un énorme glacier nous surplombe sur la droite. Ca devient féérique. Je me sens très bien maintenant, et j'en profite de tous mes yeux. C'est la première fois qu'on est vraiment tous mélangés, les rapides, les népalais, et les plus lents. Les népalais, coureurs et porteurs, font souvent des pauses. Moi je monte toujours régulier. Je continue mon petit bonhomme de chemin, et continue à doubler sans le vouloir. Mais ils vont vraiment trop lentement les autres. Ils ont l'air de souffrir plus que moi du manque d'oxygène. Ou peut-être qu'ils sont scotchés à leur altimètre, alors que moi je ne m'en préoccupe pas, ça monte, c'est tout.

 

Je suis maintenant au niveau du glacier sur la droite. Il est plus impressionnant que celui de gauche. Nous sommes entre deux 6000m. Il n'y a donc plus que 1000m au-dessus, on ne ressens plus cette impression d'immensité, je trouve que c'est moins écrasant. Le glacier est une énorme langue, très régulier, avec un front très épais et de magnifiques couleurs de glace du blanc au bleu. C'est un ravissement.

 

Maintenant, ce sont mes pieds qui sont dans la neige. Je sors les gants. La pente s'assouplit. On commence à croiser les marcheurs qui viennent dans l'autre sens, qui est le sens normal touristique du passage du col. Et surtout des porteurs, à cette altitude, il vont nettement plus vite que les touristes marcheurs.

 

Ca y est, je vois le col, avec ses drapeaux à prière multicolores qui flottent au vent. Je l'atteinthorung la 2s avec Maryse, la médecin, et Julien, un des marcheurs. Maryse lui a fait prendre un Diamox. Il y a une petite baraque en haut, où nous attend un thé. J'ai mis 4h45 pour la grimpette. Maryse nous conseille de ne pas nous attarder, il faut redescendre le plus vite possible, nous ne sommes pas faits pour vivre à 5400m. Julien ne demande pas son reste, il n'est pas trop bien. Bruno est là-haut, carrément en short. Il me demande de courir pour quelques photos. Ben tiens ! Je me sens bien, mais tout de même ! Je m'exécute, et tout se passe bien, je respire. Je prolonge la halte par un petit casse-croûte bienvenu, j'accroche un khata, l'écharpe de félicité. Je me déshabille pour la descente, j'enlève le surpantalon et le coupe-vent, je range les bâtons, je garde les gants. Et top : le pointeur me donne le départ.

 

J'ai vraiment ressenti une sensation profonde d'exaltation dans cette montée, à part les 300 premiers mètres horribles. Le paysage et l'effort physique sans problème. Les endorphines  ? L'euphorie de l'altitude ? Tout cela certainement. C'était le moment le plus magique de la course.

 

Donc voilà la descente. Tout d'abord forte, avec des passages pierreux et neigeux. Je suis seule, et je cours bien, l'altitude ne me gêne pas. La vallée est étroite, on s'y enfonce rapidement, les sommets environnants sont très verticaux, c'est beaucoup plus resserré que l'autre versant. J'arrive rapidement au premier refuge, où je rejoins Maryse et Julien, qui marchent. La pente s'adoucit désormais, on suit le torrent, d'abord sur la rive droite, puis on traverse, ce qui vaut une bonne remontée en face. Et la descente reprend, sans fin. On voit de temps en temps des yacks, des vaches, des chèvres toutes petites et à longs poils. Ce sont celles-là qui donnent le cachemire ? Mais pas âme qui vive, je suis encore trop haut. Ah si, un abri d'alpage, un autre. Puis le premier village, minuscule, avec gîte et marcheurs au repos. Que d'encouragements !

 

La vallée est toujours étroite, infinie, avec de nouveaux pics enneigés qui apparaissent et dominent. Le Gangapurna, un 7000m. Un deuxième village, un troisième village, un pont, un autre pont. Et Yangdi qui me rattrape. Elle veut que je continue avec elle. Non non, elle va plus vite que moi. Moi je cours à mon rythme, et j'admire le paysage par la même occasion. Elle s'éloigne progressivement, je vois longtemps son maillot rose.

 

Ca y est, je vomanang2is le glacier du Gangapurna, qui surplombe Manang, un monstre. Puis j'arrive dans les champs. Les vaches tirent la charrue. Voici un gros village, encore bien au-dessus du torrent. Puis le lac en face de Manang, au pied du glacier. Et enfin Manang, gros village, toujours en pierres. On traverse entièrement le vieux village, les gens m'indiquent la direction. Puis c'est le quartier touristique des hôtels. Il y a foule devant le nôtre. Les coureurs déjà là attendent les autres sur les bancs, dans la "rue", au soleil. Surtout qu'on n'est pas dans l'ordre d'arrivée habituel, puisque chacun est parti individuellement du col.

 

Ah ce fameux Thorung La !

 

Le dernier arrivé sera René. Il a été très malade au col, allongé au milieu du sentier sans pouvoir bouger, avec vomissements, et j'en passe. Un beau MAM.

 

L'hôtel est tout en hauteur, la salle commune est au troisième. On en aura eu des marches ! En plus les escaliers de Manang ont tous des marches inclinées vers le fond, c'est une spécialité locale. Au début c'est surprenant, et casse-gueule ! A Manang, on trouve du fromage de yack. Il est bien fait et délicieux.

 

Mauvaise nouvelle ce soir : on ne pourra pas passer par le lac Tilicho au retour pour les 2 dernières étapes, lac le plus haut du monde, à 5000m. Il y a beaucoup de passages les plus hauts du monde dans cette course, Himalaya oblige. C'est trop glacé, il faudrait être équipé pour l'alpinisme, ce qui n'est pas le cas avec nos petits crampons que nous avons donc trimballés pour rien, nos bâtons de course et nos 3m de corde. Ce sera retour par le col du Thorung. Dommage ! Ca ne me plait pas de repasser 2 fois au même endroit, même si on ne voit pas les choses pareilles dans l'autre sens. Mais on n'a pas le choix.

 

Le lendemain, c'est le marathon de Manang, le long de la rivière. Loin d'être plat. On descend le torrent rivemanang1 gauche en passant par les petits villages... qui sont haut perchés, et on revient en remontant le torrent rive droite par la piste. Ce qui nous fera le bagatelle de 1500m de dénivelé. Les marcheurs sont exonérés de marathon, et René en est interdit après son MAM. Ils iront faire une petite rando vers le somptueux glacier. Quant à nous, le départ est sur la piste jusqu'au premier village, dans la vallée. Je pars à mon rythme. Puis c'est un sentier qui  grimpe sec vers le village suivant. Gaëtan me rattrape, on monte ensemble, puis il part devant, je ne peux pas le suivre. Descente et remontée vers le village suivant, parmi les champs en terrasse. Tiens, une espèce de petit écureuil traverse le chemin devant moi. Enfin grande descente vers le torrent, pour une fois sans marches. Au fur et à mesure de l'avancée dans la vallée, on découvre de nouveaux sommets, tous différents, avec encore de très beaux glaciers. C'est un ravissement toujours renouvelé. Il y a une fontaine au bord du chemin. Une chèvre est grimpée sur la margelle et boit au tuyau. Maligne la chèvre ! Les villages sont annoncés par des moulins à prières. On arrive dans une pinède, ça sent la Provence. Me voici à une bifurcation. Je pense que la bonne direction est à gauche, car on doit remonter vers Pisang les hauts, mais il y a une flèche à droite. Je prends donc à droite, et arrive directement au pont. Le pointeur est là à Pisang les bas, alors qu'il aurait dû être en haut. Bref, il valide mon itinéraire. Le retour par la piste n'est pas marrant. Il n'y a aucun village dans la première partie, c'est dans la forêt, on ne voit pas les montagnes. Il y a juste les scieurs de long pour me distraire, avec leur énorme scie, un à chaque bout. On arrive enfin à un village, il y a là l'aéroport de Manang, d'où la présence d'une piste, qui s'arrête là et ne va pas jusqu'à Manang. Mais on n'y voit aucun véhicule. On passe au pied de superbes cheminées de fée avant d'apercevoir le glacier du Gangapurna, on se rapproche de Manang. On retraverse la rivière pour se retrouver au premier village, et retour à Manang.

 

Balade dans le village l’après-midi. Je tombe par hasard sur un monastère. C'est l'heure de la prière. C'est lancinant et envoûtant. Le soir on a le droit à un plat de pâtes avec du fromage de yack. Un délice.

 

L’avant dernier jour de course arrive déjà. Je suis à 5mn derrière Joël au classement. Nous remontons donc vers le col du Thorung, jusqu'à l'avant dernier gîte, Thorung Phedi, 4400m. Au moins, on n'aura pas de surprise sur le parcours. La montée est douce, avec les traversées des tous petits villages. montée vers le thorung la depuis ManangJe rattrape Joël, des petites chèvres cachemire caracolent devant nous, et je le dépasse, il ne me suit pas en montée. Puis ce sont les alpages, dans la vallée qui se resserre. On descend vers le torrent pour le traverser, et la montée reprend, toujours douce jusqu'au gîte, au pied de la neige. Je pensais que le gîte était le suivant, et qu'on aurait un bout un peu plus raide à la fin, mais non, ce sera pour demain. Il fait beau à l'arrivée, juste assez chaud pour que ce soit agréable. Le temps se couvre après, quelques flocons épars commencent à tomber, mais ça ne dure pas. Ce soir, il n'y a pas d'eau dans la salle de bain / toilettes, juste un seau plein et aucune douche. Le seul robinet disponible est dans la cuisine.

 

René arrive doucement, il ne doit pas forcer, mais ça va, il s'en sort. Quant à Eric, il débarque avec les 2 jambes hyper gonflées. Une énorme tendinite des releveurs. Impossible pour lui de continuer. Après voir envisagé la solution locale des mules, ce sera pour finir l'hélico qui le ramènera le lendemain directement à Katmandou. Il n'y a pas de PGHM, les hélico sont privés. C'est pris en charge par son assurance, nous devions avoir obligatoirement une assurance secours en montagne par hélico.

 

Le soir, c'est riz et lentilles au menu, pour changer. O surprise, les népalais n'en mangent pas. Ils ont de la tsampa, une bouillie d'orge. Ils ont trouvé que le riz de Thorung Phédi n'était pas bon. J'ai évidemment goûté la tsampa, pas mauvais. J'ai bien dormi, j'en suis étonnée à cette altitude. C'est l'acclimatation qui est positive. Le médecin la contrôle à nouveau.  68 pulsations /mn et 92% de saturation en oxygène. Tout baigne.

 

Voici arrivé le dernier jour de course. Départ à 5h vers le col, comptant dans le temps de course cette fois, ce qui change  tout, pour 1000m de dénivelé de montée. Suivi de la descente vers la Kali Gandaki pour rejoindre Jomoson, la préfecture. De 5400m à 2700m.

 

Cette fois je pars vêtue "léger", juste le surpantalon et le coupe-vent, avec les gants à portée de main. On attaque par une forte pente jusqu'au Thorung La. Les népalais partent en courant. Je me contenterai de la marche. Donc j'attaque la montée vers le fameux col du Thorung, de grand matin. Je marche bien, juste derrière Maud et Morgane qui grimpent ensemble. La pente est raide jusqu'en haut. Peu avant le sommet, je commence à avoir envie de vomir. Ca m'oblige à ralentir, bien que les jambes et le souffle ne peinent pas du tout. Je suis toujours juste derrière les 2 filles. J'arrive dans la neige. Toujours envie de vomir, heureusement légèrement. Je me décide à prendre un Diamox, puisque je le porte, autant que ça serve. Ca y est, je suis en haut. J'y arrive juste quand les filles en partent. Je fais une petite halte rapide pour accrocher un khata, et me déshabiller pour la descente et ranger les bâtons. Je sens que j'ai le cerveau un peu au ralenti, et les gestes aussi. Atteindre 5400m vite fait, ça laisse quelques traces. Je suis même pressée de redescendre pour ne plus avoir envie de vomir. J'ai tout de même fait une sacrée bonne montée. A la même vitesse que Maud, ce n'est pas rien !

 

J'attaque la longue descente. Tout d'abord en courant doucement, les jambes sont aussi au ralenti. La nausée passe immédiatement. La pente est douce au début, dans la neige gelée. Puis elle s'accentue, et la vue sur la vallée s'ouvre progressivement. Je peux accélérer assez rapidement. La neige fait place aux pierres, puis aux alpages. Quelques vaches profitent du paysage, moi aussi. On embrasse toute la chaîne enneigée en face. J'arrive au temple de Muktinath, désert à cette heure encore matinale, puis à Muktinath village, vite traversé cette fois. Déjà 1500m de dénivelé de descendu en un rien de temps.

 

Après Muktinath, nous prenons la grande piste presque jusqu’au fond de la vallée. Je rejoins d'abord le village de Jharkot, que j'ai déjà visité par mégarde à l'aller. Ca va, je connais les raccourcis pour y aller. Je dois faire le plein d'eau. Un magnifique tuyau me tend les bras. Je demande quand même prudemment si je peux boire cette eau. Non ! Il faut prendre un peu plus loin, au robinet. Un monsieur m'y conduit. Il est très curieux de savoir quelles sont les petites pastilles que je mets dans l'eau. Puis c'est la piste, très poussiéreuse à chaque passage de 4x4. Heureusement, ce n'est pas l'autoroute. La piste fait justement un grand détour à flanc de montagne. Un monsieur me montre le chemin qui coupe à travers les cultures. J'y retrouve des enfants en uniforme de l'école. Un gamin m'accompagne en courant avec moi, il en est tout fier.

 

Je rejoins la piste, qui descend lentement. Voici un chemin à gauche. Ce devrait être ma direction, mais le briefer a dit qu'il faut continuer la piste, mais ne pas passer par Kagbeni dans la vallée plus sur la droite. J'arrête un 4x4 pour demander confirmation, car ça me semble bizarre de suivre la piste vers la droite. C'est bien par là. J'aperçois en bas de beaux champs en terrasses. La piste plonge vers le fond en virages en épingles à cheveux, avec un sentier qui coupe tout droit. Je suis sûre maintenant que j'ai pris la mauvaise direction et que je vais à Kagbeni, mais c'est trop tard pour faire demi-tour. Ca me rallongera de quelques km. Je prends le sentier, et débarque donc à Kagbéni. Un militaire à l'entrée du village me confirme que je me suis fourvoyée. Ai-je bien écouté au briefing ?

 

Enfin, je ne suis pas perdue. Je suis dans l'énorme vallée de la Gandaki, un peu plus en amont que ce qu'il faudrait. Je descends donc la vallée. Misère ! Un vent à décorner les boeufs souffle de face. Au point qu'il est impossible de courir. Sans compter la poussière. Mon détour en sera plus long en temps que ce que je pensais, si proche de l'arrivée. Mince alors ! Je suis quand même pressé d'arrivée maintenant. Je coupe par le lit de la rivière, en marchant le plus vite possible avec les bâtons que j'ai ressortis. Je rattrape la piste et le sentier par lequel j'aurai dû arriver au village suivant. Etrange village, il n'y a personne. Tout a l'air mort.  Déjà que je ne suis pas fière d'avoir perdu 1h, ça ne me remonte pas le moral. Heureusement, Jomoson n'est plus très loin. Je coupe de nouveau par la rivière, cette fois en terrain connu puisque nous l'avons déjà fait dans l'autre sens.  Ce qui ne m'empêche pas de me prendre les pattes dans les bâtons et patatra, le nez dans la poussière. Manquait plus que ça ! C'est la fatigue, évidemment. Je repars sans mal. J'arrive enfin à Jomoson, je passe le pont avec les voyageurs qui vont d'une gare routière à l'autre. Il ne reste plus qu'à traverser toute la ville pour rejoindre l'aéroport, l'hôtel est en face. Avec le vent, il n'y a pas grand monde dans la rue et toutes les devantures des magasins sont fermées, alors que c'était très animé dans l'autre sens. En fait, le vent se lève tous les jours à midi. J'arrive à l'hôtel, tout le monde m'attend et a compris que j'avais été visiter Kagbeni. Joël qui était derrière moi est bien sûr là, depuis 1/2h. Je perds une place. C’est ce qui arrive quand on en rajoute. C'est déjà fini, bien que j'aurai volontiers continué pour quelques étapes supplémentaires. remise des récompenses2

 

La course est finie, mais pas le séjour au Népal. A Jomoson nous sommes dans un vrai hôtel, avec des vraies toilettes et une vraie cuisine. L'après-midi de l'arrivée fut consacrée à la bière, j'ai bu ma première bouteille. Le soir c'était le repas d'arrivée de course, chouette, du riz et  des lentilles ! Et la dernière soirée en présence des porteurs, qui faisaient entre autre le service tous les soirs. Soupesoupe !

 

Le lendemain matin nous prenons un minuscule avion à l'aéroport juste en face de l'hôtel, très pratique, pour rejoindre Pokhara. Nous étions 28, cela fait 2 rotations tellement l'avion est minu

s. Il n'y a des vols que le matin car après il y a trop de vent. C'est un des plus beaux vols que j'ai fait. On descend la vallée de la Gandaki qui arrive à Pokhara, en restant entre les montagnes. Je ne sais pas à quelle altitude on volait, mais pas haut par rapport au sol. C'est très chouette, on reste en-dessous des sommets. Dommage, ce n'était pas long.

 

A Pokhara nous avions toute la journée de libre avant de reprendre un autre avion pour Katmandou le lendemain matin. C’est est une ville très touristique, car c'est le point de ralliement pour le tour des Annapurnas, avec un grand lac. Il y a un petit temple sur une île. Quelle vue de là ! Le lac, les montagnes derrière, et les sommets enneigés de la chaîne des Annapurnas tout au fond.yack1

 

Nous rentrons le lendemain à Katmandou en avion. C'est la remise des prix puis le dernier repas tous ensemble. Les français repartent le soir même. Nous sommes le 9 mai. Nous restons encore 2 jours à Katmandou, nous en profitons pour visiter les villes impériales de Patan et Baktapur, avec leurs palais et leur temples.

 

Et retour sur Bangkok le lendemain, avec un massage bienvenu après nos 350km et 13000m de dénivelé.

 

A la prochaine virée au Népal ! Avec ses montagnes gigantesques et ses habitants accueillants, inoubliable !

 

 

Je remercie How Choong Environnement, Logistisud, Stesi, Idéa, Mischler, VD Systèmes qui m'ont permis de découvrir les Annapurnas et de vivre cette aventure hymalayenne.

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28 janvier 2011 5 28 /01 /janvier /2011 17:24

Le désert du Namib est l’un des plus beaux déserts du monde. C’est aussi le  plus vieux, la bagatelle de 80 millions d’années. Et l’un des plus riches, plein de diamants et d’uranium. Allons y faire un petit tour, peu aprènamib-desert-6484.jpgs le Grand Raid, ça me changera.

 

C’est parti pour 100km, en 4 étapes : les 100km du désert du Namib.

 

La course a lieu du 5 au 10 décembre, en plein été austral.

 

Nous sommes 54 coureurs, dont 14 femmes. Voilà que je me retrouve la seule française. Le plus gros de la troupe est italien, l’organisation étant italienne. Complété par deux anglais, trois allemands, deux espagnols et une namibienne.

 

L’italien, c’est facile. Il y a 3 mots indispensables :

-          Ciao, lancé à tout bout de champ dès qu’on croise quelqu’un,

-          Bellissima, indispensable qualificatif pour tout ce qu’on peut voir,

-          Bravo, brava, bravi, suivant que l’on s’adresse à un monsieur, à une dame ou à plusieurs personnes.

Avec ça je suis parée pour une semaine.

 

Je rejoins le groupe à l’aéroport de Windhoek, capitale de la Namibie, après une semaine de repos en safari. L’avion en provenance de Francfort a deux heures de retard, pour cause de neige. J’avais oublié que cela pouvait exister.

 

C'est aussitôt le transfert en bus 4x4 vers le désert du Namib et notre lodge. On y arrive après 8h de trajet et pas mal de piste. On traverse la réserve de Naukluft, ce sont des petites montagnes de granite rouge. C'est très beau. On voit régulièrement des babouins, des girafes, des pacochères.

 

Le lodge est situé dans une vallée entre la réserve de Naukluft d’un côté et le parc du désert du Namib de l’autre, entre les montagnettes de granit rouge et un cordon de dunes rouges. Il s’étend sur pas moins de 45 000 ha pouostrich-walking-namibia 12609 600x450r nous tous seuls. Il n'y a pas de mur d'enceinte ni de clôture, les bungalows sont dans la savane parsemée d’une herbe courte et sèche. Les couleurs sont magnifiques. Il y a un point d'eau près du restaurant, les springbocks et les autruches viennent boire. Les chacals essaient de glaner un peu de nourriture. Je partage un bungalow avec une anglaise.

 

Le lendemain la matinée est consacrée à l'enregistrement et aux contrôles. L’après-midi au repos, la piscine est bienvenue avec la chaleur, même si elle est petite et ne permet pas vraiment de nager.

 

Les organisateurs me demandent déjà si je vais gagner. Ma réputation désertique m'a précédée. Un mois et demi après le grand raid, je suis venue me faire plaisir avant tout. Les autres coureurs sont tous des marathoniens, donc bien plus rapides que moi. Plusieurs d’entre eux me demandent des conseils, notamment les allemands.

 

La 1° épreuve de 15km a lieu le soir à 18h, après la chaleur. Le départ est donné de l'hôtel. Le personnel nous fait un petit chant namibien d'encouragement. On emprunte  une piste dans la savane en direction des montagnes, avec les springbocks comme spectateurs. C'est un faux-plat montant. Je me retrouve vite 3° féminine derrière Adèle lajour1 3 namibienne et Isabel l'espagnole. Puis c'est Anne l'allemande qui me double. On quitte la piste, il n'y a plus de chemin et ça monte un peu plus. Le sol est très sec, avec plein de petites boules de terre dures, ça fait un peu comme les gratons réunionnais sans être coupant. Anne peine et je la redépasse. Au pied des montagnes c'est le retour par une autre piste, donc descente en pente douce. Le coucher de soleil est devant nous, avec au fond les dunes rouges. C'est splendide. Anne me redouble peu avant l'arrivée. J'ai mis 1h32. Toutes les autres filles derrière sont des italiennes.

 

La 2° étape est le lendemain matin, 20km, avec un départ à 5km de l'hôtel à 6h et arrivée à l'hôtel.sossuvlei.jpg

 

L’origine du désert du Namib est très particulière. Le fleuve Orange, qui fait la frontière entre la Namibie et l'Afrique du sud, emmène de grosses quantités de sable jusqu'à son embouchure. Là il y a tout le temps un très fort vent vers le nord qui ramène ce sable vers les terres au nord. Et ce depuis des millions d'année. De quoi faire un désert, tout en longueur, le long de la côte atlantique. Il existe un courant froid sur cette côte, si bien qu’il y a des phoques et des pingouins sur les plages désertiques.  Notre hôtel est situé sur le bord intérieur du désert, à 150km de la mer.

 

On démarre par une petite descente dans les cailloux. J'y vais djour1_2.jpge bon coeur, et me retrouve avec les 3 premiers de la course ! C'est bien la première fois de ma vie que je suis avec les 3 premiers ! Tout le monde a descendu cette descente timidement. Ma quatrième place ne dure évidemment pas. Les 3 donzelles me dépassent allègrement, Isabel, Adèle, puis Anne. Nous sommes sur une piste qui serpente dans la savane, et qui nous mène vers l'entrée du canyon de Sesriem. Les dunes du désert sont derrière nous. Héléna me double juste avant la descente de l'entrée du canyon. J'y vais de nouveau de bon coeur, mais pas elle. Elle n'a pas l'air d'aimer les descentes. Je ne la reverrai plus jusqu'à l'arrivée.

 

Nous sesriemsommes dans le lit d'une rivière sèche, que des pierres, entourés de falaises ocres. Le défilé fait 3km de long, et il est superbe. Sauter de pierre en pierre ne me gêne pas du tout, je double quelques coureurs moins à l'aise. On sort de là par un escalier. Puis c'est de nouveau la piste dans la savane en longeant une grande dune rouge, avant de regagner la route principale pour 2km qui nous ramène à l'hôtel. Nous traversons le village des employés de l’hôtel sous leurs encouragements. J'ai mis 2h04. Je suis toujours 4°, Isabel est loin devant, et Adèle, Anne et moi sommes dans un mouchoir de poche.

 

Les pierres du canyon ont fait quelques dégâts aux chevilles, et il y a déjà une déshydratation.

 

Le pire, c'est qu’à 8h30, j'ai fini la course, et qu'il n'y a pas grand chose à faire de la journée après, à part se rafraîchir à la piscine et bouquiner. Il n’y a pas de vrai village. Vraiment dommage que la piscine soit si petite, mais dans un désert, on ne va se plaindre d’avoir un peu d’eau. Il n’a pas plu depuis 4 ans dans le coin.

 mid Gravures Rupestres Des Bushmen

En fin d'après-midi je vais faire un safari avec mon anglaise. Même s'il n'y a pas beaucoup d'animaux dans cette région sèche, c'est toujours intéressant d'être avec un guide. Il nous montre en particulier des renards. Et des peintures rupestres des bushmen dans les montagnes.

 

3° étape : le lendemain on enchaîne sur 42km. Pour beaucoup de coureurs, c'est le stress, et les organisateurs en rajoutent pour faire monter la pression de la difficulté. On part à 5h30, à 3jour3 1km de l'hôtel, le jour se lève. Quand il y a des drapeaux oranges, on n'est pas obligé de suivre la piste qui zigzague, on peut aller droit, de drapeau en drapeau. Jusqu'ici j'ai couru en short, mais aujourd'hui j'ai sorti le collant et les guêtres, je suis la seule pour le collant. On commence par longer la bande de dunes sur une piste qui serpente dans la savane pendant 20km. Isabel et Adèle sont devant, Anne me double, puis arrivent Héléna et Marta. Voilà les drapeaux oranges. On abandonne la piste, et tout de suite les italiennes lâchent prise.

 

On se dirige droit vers les dunes. J'attaque la montée, elle n'est pas très forte, et il y a encore jour3 4une peu d'herbe sur le sable. Pas de difficulté pour moi pour continuer à courir. Je suis la seule. En haut, voilà le sable mou, ça se corse. Tiens, une petite descente dans ce sable. Chouette ! La suite du parcours est vallonné, on reste en crête des dunes, avec alternance de sable mou et de passages herbacés. Je cours toujours, alors que certains se sont mis à marcher. Peu avant le sommet de la dernière côte, je double Anne, elle marche. Puis c'est la dernière descente pour retrouver la savane en pied de dune.

 

Je vois un drapeau orange. Appliquant strictement les consignes, je trace direct. A ma grande surprise, tous les coureurs devant moi suivent la piste qui fait un détour, y compris Adèle. Suis-je dans mon bon droit ? Tous les coureurs derrière moi me suivent. Adèle me dira après que j'ai eu raison et qu'elle n'avait pas vu le drapeau. Deuxième drapeau, je coupe encore plus court, avant de rejoindre la piste qui file droit maintenant, au milieu des oryx. Il commence à faire chaud, et je sens de plnamib-desert 6457[1]us en plus la soif. Je prends de l'eau fraîche à chaque fois que je croise un véhicule de l'organisation, car la mienne est chaude maintenant.

 

Soudain, Adèle me double à grande vitesse. Je suis surprise qu'elle aille si vite, car j'estime qu'il nous reste encore 4km. Aussi je l'encourage. Je reconnais le site du départ, il y a un ravitaillement, et encore 3km jusqu'à l'hôtel. Je m'arrête boire, et je repars d'un bon train. Stop, stop ! C'est fini ! C'est l'arrivée. Je comprends le sprint d'Adèle ! J'étais persuadée que l'arrivée était à l'hôtel. Il faut dire que la veille, j'étais en safari au lieu d'écouter le briefing. Du coup je finis cette fois 3° en 4h43, à quelques secondes d'Adèle. Quant à Isabel, elle est 1/4h devant.

 

 

J'ai impressionné ceux qui ont couru à mon niveau, car je cours tout le temps. Quand j'ai vu Adèle sprinter pour me doubler au bout de 40km de course, je me suis dit que je ne la suivrai pas, elle le paierait le lendemain. Et ça n'a pas manqué.

 

Je ne regrette pas du tout de courir en vêtement long. Ca protège de l’ardeur du soleil. Beaucoup n'ont pas mis de guêtres et certains pieds commencent à souffrir. Le sable est très abrasif.

 

Les derniers coureurs arrivent à 14h, par 45°C au soleil. Il vaut mieux courir vite et finir tôt ! Et faire une bonne sieste à cette heure-là avant d’être au frais au bord de la piscine.

 

Dernière étape : 23km. On part à 5h de l'hôtel pour un transfert de 45km à Sossusvlei. Le coup d'envoi est donné à 6h. Nous sommes dans une vallée entre deux cordons de dunes, toujours rouges. Là il n'y a que du sable. Au soleil levant, ça vaut le déplacement. On court 15 km dans cette vallée au pied des dunes sur un sol dur, sans piste. Isabel et Anne sont devant, je double très rapidement Adèle. Elle abandonnera au 15° km, quand les difficultés apparaîtront. Héléna me rejoint au 15°km.

 

Là nous bifurquons droit sur les dunes. Le sable est mou et ljour4 1e sera jusqu'à la fin. Première  petite dune à franchir, Héléna rend l'âme, elle marche. Deuxième dune un peu plus haute, je cours toujours et en dépasse quelques-uns. Puis une bonne descente. Yaouh ! Il y a un ravitaillement en bas, je ne m'arrête pas, contrairement aux autres. On se retrouve dans une nouvelle vallée qu'on suit pendant quelques km, sur un terrain un peu plus dur. C’est un lac asséché, où il y a de l’eau quand il pleut.

 

Nouvelle bifurcation et nouvelle montée de dune, qui nous mène au pied de la fameuse "Crazy Dune". C'est la plus haute du monde, 300m de haut. Que c'est beau ! La grimpette se fait le long jour4 4d'une crête de pente irrégulière, que je ne trouve pas si raide à première vue. Je m'attendais à pire. J'attaque la montée bien régulièrement, c'est le seul endroit où je ne courrai pas, c'est trop raide et trop mou. Je cale bien mes pieds à l'horizontal en les enfonçant dans le sable mou, et j'appuie sur les cuisses. Je suis la seule à monter comme ça, et je double 6, 7, 8 coureurs, peut-être plus, je ne compte pas. Dès que la pente est plus faible, je me remets à courir, même sur une petite distance. A 20m du sommet, qui vois-je ? Anne, qui n'en peut plus. Elle me laisse passer, admirative. Et Isabel ! Elle entame la descente. Et dire qu'elle était 1/4h devant moi la veille ! J'ai mis environ 40 mn pour monter, je ne sais pas exactement car je n'ai pas regardé ma montre au bon moment en bas et en haut.

 

Et maintenant la descente. Ah, quelle descente ! Impressionnantdead valleye. 300m plus bas au bout d'une pente raide, il y a une espèce de dépression argileuse toute blanche. C'est là qu'on va. Je la fixe et m'élance, bien en équilibre, en me laissant glisser dans le sable à chaque foulée. On m'a dit que je volais, et j'ai épaté tout le monde tellement je descendais à l'aise. Ceci dit, 300m, c'est long ! Il faut tenir sans ralentir.

 

En bas on traverse la dépression, où il y a des troncs d'arbres morts. On l'appelle le Dead Valley. Les arbres ont 500 ans paraît-il.

 

Enfin, la dernière dune à gravir. Fastoche celle-là. La même que la précédente, mais en miniature. Je la passe en courant, avant d'entamer la dernière descente vers l'arrivée finale. Je finis à 1 mn d'Isabel. Qui n'a pas de guêtres et qui, elle, finit pieds nus. Quant à Anne, qui n'a pas de guêtres noncrazy dune plus, elle marchera en chaussettes pendant les 2 jours suivants, les pieds à vif.

 

Je boucle la dernière étape en 3h04, et termine 2° au général. C'est l'étape que j'ai préférée.

 

J'ai impressionné beaucoup de coureurs les 2 derniers jours, dès que ça devient un peu technique.

 

J'ai demandé aux organisateurs de faire une 5° étape, j'étais bien la seule !

 

Le soir, nous avons eu un bushbraii. Le braii est une institution en Namibie, c'est un barbecue. Et c'était dans le bush, la savane. Aux flambeaux. C'était très chouette.

 

Le lendemain matin, c’est le retour vers Windhoek. Nos bus 4x4 ont crevé 2 fois, des fois il vaut mieux se déplacer à pied !

 

Ciao !

 

 

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1 janvier 2011 6 01 /01 /janvier /2011 00:31

Enfin, je me décide… Habituellement, je « ponds » mes récits de course sitôt rentré de mes périples mais là, je dois bien avouer que l’inspiration autant que l’envie me font défaut.

Pourquoi ? je ne sais… sans doute la crainte de déformer, de dénaturer, de travestir mes souvenirs, mes sentiments, mes rêves… Non, on ne rentre décidément jamais vraiment indemne d’un voyage en Himalaya. S’agissant de l’Himal race, j’en suis encore tout commotionné… de bonheur.

Pour venir à bout de cette course, il m’aura fallu user d’un certain courage, d’une grande persévérance parfois teintée d’une once de masochisme et être animé d’une farouche volonté de réaliser les 10 commandements …ceux de l’Himal Race.

 HIM3138  Himal-Race 0973

 

1-      De nombreux kilomètres tu parcourras 

 

HIM3026 

Commençons par « planter le décor ». L’Himal Race, c’est 850 kilomètres parcourus, 32 000 mètres de dénivelé positif, autant en négatif, 10 passages de cols qui culminent à plus de 5 000 mètres d’altitude (5 600 m de maxi), un sac de course pesant entre 8 et 12 kilos, des températures plutôt fraîches (-10 à -15° C la nuit) et des conditions de course et de repos pour le moins spartiates (triste record : 11 jours sans me laver !).

 

 

2-      Un bon matériel tu choisiras  

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J’ai eu la chance de bénéficier d’un généreux bienfaiteur, Raid light Run Escapades, qui m’a procuré du très bon matériel et fourni de pertinents conseils (merci beaucoup Joël). C’est d’ailleurs indispensable dans ce genre d’épreuve. Le matériel devant être parfaitement adapté aux conditions extrêmes mais aussi suffisamment léger pour ne pas pénaliser les coureurs. Il m’aura fallu faire des choix entre confort et légèreté. En matière de vêtements par exemple, je ne disposais que d’une tenue de course et d’une tenue de soirée… Je ne pense avoir emporté que le strict minimum, contraint à couper le manche de ma brosse à dent et à supprimer ficelle et élastique de mon sac de course !

 

 

 

3-      De la hauteur tu prendras  

 

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L’altitude a constitué un facteur très difficile à gérer. Pour ma part, je n’avais effectué que deux passages de cols à plus de 5 000m avant de courir cet Himal Race. Autant dire que j’étais un « puceau des sommets ». Sur le début de course, au Tibet, le manque d’acclimatation consécutif à une montée trop rapide a failli m’être préjudiciable. Par trois fois, mon taux de saturation en Oxygène est descendu en dessous de 65 % provoquant de violents maux de crâne et une incapacité à marcher normalement, ne parlons pas de courir… Je suis parvenu à passer le cap, d’autres ont eu moins de chance.

 

 

4-      Sur le chemin tu resteras

 

Une des principales difficultés de l’Himal race, c’est de progresser sur des chemins dépourvus de balisage. Les cartes d’orientations que l’on nous avait fournies étant erronées et imprécises, nous avons été souvent contraints de « jardiner », retrouvant notre chemin à force de persévérance et parfois de chance. Il devenait alors nécessaire de ne pas « aller trop loin » dans l’effort physique pour conserver suffisamment de lucidité. 



Himal-Race 1144          Himal-Race 1040

 



 

5-      D’étonnantes surprises tu vivras



L’édition 2010 de cet Himal Race, la troisième, a révélé de multiples surprises rendant notre tâche particulièrement difficile : la répétition de l’effort en milieu appauvri en oxygène, des vols de chaussures et de vêtements, des coups de sabots de yak, des erreurs de lecture de parcours nous obligeant à dormir « à la belle étoile » à 3 800m d’altitude… vous en connaissez beaucoup des courses où il devient nécessaire de dépecer puis de manger une chèvre au beau milieu des bois ! Mais toutes ces difficultés ont engendré du positif, une aventure humaine hors du commun : solidarité, patience, don de soi, résignation, partage… L’Himal race fait s’exprimer le meilleur de soi même.

 

P1000957                Himal-Race 1111

 

 

6-      De précieuses denrées tu te nourriras

   

Les compléments alimentaires dont les laboratoires NUTERGIA m’ont fait bénéficié ont constitué « un plus » indéniable autant dans la gestion de l’effort (Ergysport Stim, boisson d’effort), que dans les phases de récupération (Ergyrecup, boisson Regen). Je me suis senti dans de bonnes dispositions tout au long de l’épreuve, et même de mieux en mieux au fil des étapes. J’ai découvert de nouveau talent à mon organisme, capable de s’adapter à l’effort et de gérer avec grande habileté la fatigue. Les produits NUTERGIA m’ont permis « d’encaisser » près de 140 heures d’effort et de parfaitement récupérer les jours d’après course.

 

P1010974         Himal-Race 1166

 

 

7-      Le moral tu garderas

 

Le mental a été un facteur déterminant dans la réussite de cette épreuve. Il fallait être solidement « armé » pour vaincre l’Himal race. Enchaîner tous les jours, 10 heures d’efforts lesté d’un sac d’une dizaine de kilos en haute altitude, c’était rude. D’autant que les conditions de repos n’étaient pas vraiment réunies : repas souvent appauvris (peu calorifiques) et répétitifs, froideur du climat, lieux de couchage plutôt spartiates (préau d’école, salle de prière, tente…). De plus, les incertitudes concernant le parcours, les approximations dans l’estimation des distances ont miné le moral de certains coureurs. Pour ma part, j’ai vécu ces événements avec détachement et philosophie. C’est un aspect que je recherche et que j’apprécie, partir au gré du vent et bâtir son voyage chemin faisant. 

 

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8-      De fabuleux paysages tu contempleras

 

L’Himalaya est une région extraordinaire, les paysages y sont fabuleux, grandioses, majestueux. On se sent ridiculement petit, insignifiant lorsqu’on fait face à ses montagnes, ce sont de vrais monstres sacrés. J’ai été particulièrement impressionné par le calme qui y règne, par la puissance qu’elles dégagent. Pour un amoureux de la montagne que je suis, l’Himalaya est un endroit sacré, c’est un sanctuaire. Le plaisir, le bonheur que j’ai connu en « visitant » ces montagnes étaient si grands, si beaux… J’ai dévoré chaque instant, chaque seconde de ce périple avec délectation. J’ai pu sentir, écouter, respirer… Mes sens en éveil, j’ai parcouru le chemin, le bonheur.  

 

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9-      Des êtres extraordinaires tu rencontreras

 

Les Népalais sont des gens fabuleux. Souriants, accueillants, ouverts, hospitaliers, ils sont d’une simplicité, d’une générosité, d’une gentillesse extrême. On a l’impression qu’au plus les conditions de vie sont difficiles, au plus l’être humain a la préoccupation de partager, de s’ouvrir aux autres, d’écouter, de chercher à comprendre. J’ai reçu une grande leçon de vie… Pour ce qui concerne le groupe de coureurs, il était tout simplement formidable, nous sommes devenus au fil des heures passées ensemble de vrais complices et l’émotion été grande lorsqu’un des nôtres était contraint à l’abandon.

 

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10-      Une expérience unique tu vivras

 

Le voyage est devenu au fil des kilomètres parcourus ce compagnon indissociable de l’Himal Race : voyage dans l’espace bien sûr, voyage dans le temps également, mais aussi et souvent voyage intérieur. J’ai très rapidement perdu mes repères et me suis volontiers laissé porté, guidé par les événements. Le voyage n’était plus seulement géographique, culturel, historique, il devenait spirituel. J’ai cherché à repousser mes limites le plus loin possible, mettant à profit chaque minute de ce voyage pour m’imprégner du mieux possible de ce fantastique univers. J’ai pu ressentir le bonheur de me retrouver « ici et maintenant ».

Dans certaines régions, c’était de l’exploration, le chemin se dessinait au fur et à mesure que l’on avançait. Ce côté exploratoire était totalement inattendu, aucune autre course ne propose « cette dimension ». C’est pour cela que l’Himal race est plus qu’une course, c’est une réelle aventure.

 

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 Mes pensées vont à mes proches qui m’ont entouré de leur amour et de leur soutien pendant ce voyage, et à Chris, qui m’a tant appris et à qui je rend hommage.

 

 

 

 

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15 novembre 2010 1 15 /11 /novembre /2010 21:16

 

AVRIL 2010

 

Peu après m'être frotté aux 42,195km du marathon de Paris, s'ouvre la période des inscriptions pour le Grand Raid 2010. Le seul avantage que je vois à mon nouveau statut de métropolitain, c'est que je peux désormais éviter les aléas du tirage au sort. Mais faut se décider vite, les dossards vont s'arracher. Après quelques vagues hésitations, la participation de ma grande frangine Sophie qui se lance sur le Trail de Bourbon et la revanche que j'ai à prendre sur mon chemin de croix des 30 derniers kilomètres de l'année dernière finissent par me décider. Je valide mon inscription et réserve mon billet d'avion. Comme ça c'est fait, impossible de reculer !

Antoine, mon plus jeune frère se décide de son côté à venir nous accompagner à La Réunion et sera donc là pour nous assister sur le parcours.  Cela s'annonce bien. Il ne reste plus que quelques mois pour s'entraîner et, en île de France, difficile de trouver du dénivelé quand le point culminant dépasse péniblement les 200 mètres. Pas grave, on fera avec (ou plutôt sans). 

 

Début août, le trail du Tour des Fiz en compagnie de Sébastien, Raphaël et du grand Stéph' confirme que mes palliatifs aux sentiers réunionnais (vive les montées d'escaliers) ne sont pas trop mauvais. J'ai quand même souffert dans les longues côtes du parcours, mais il me reste encore plus de deux mois pour arriver fin prêt.

 

 

JEUDI 21 OCTOBRE

 

 

18h30 :

Antoine démarre la voiture et me conduit en direction de Saint-Philippe et le Cap Méchant. Première halte pour embarquer le grand Stéph, puis deuxième arrêt pour prendre Vincent et c'est parti... Enfin presque. Car après 30 minutes de route, Vincent s'aperçoit qu'il a oublié son dossard. Coup de fil à sa femme qui lui ramène le précieux sésame à une station service où nous l'attendons en chambrant Vincent comme il se doit (avec une petite pointe d'inquiétude malgré tout car le timing n'était pas si large que ça).

 

21h30

Arrivée à Cap Méchant, contrôle du matériel obligatoire dans les sacs et parcage des 2500 fous en attendant le départ. Tout cela me semble familier par rapport à l'année dernière... sauf que cette fois, pas de pluie à signaler! Youpi ! Dans ma tête, j'ai un objectif "raisonnablement ambitieux" : boucler le parcours en 40 heures et en bonne santé, soit le même temps que l'an passé en dépit du parcours rallongé d'une dizaine de kilomètres. Si mes estimations sont bonnes, cela devrait m'amener dans les 300 premiers (j'étais 400ème l'an dernier). Le timing des différents points de passage a été mûrement réfléchi à grands coups de simulations sur des tableaux Excel. Ce Grand Raid 2010, je l'ai déjà fait et refait au moins dix fois... derrière mon ordinateur (ça fait moins mal aux jambes).

 

22h00

Au coup des canons, le départ est donné et on s'extrait laborieusement du stade en veillant à rester tous les trois ensemble. Pas facile car la foule est compacte. Je tiens la main de Stéphane comme ma fille tenait la mienne pour sa première rentrée scolaire.

 

photo generale 2Après quelques kilomètres de bitume qui passent rapidement, nous arrivons à l'intersection avec la route forestière où je  parviens à repérer Antoine malgré la densité des coureurs et des spectateurs présents. Une petite tappe dans la main et on se donne rendez vous à Cilaos 14 heures plus tard, si tout va bien.

 

Les 11 km de route forestière se passent sans encombre en trottinant même si les sensations ne sont pas excellentes. Je reste juste derrière Vincent et Stéphane et ne dit pas grand chose, me contentant de suivre leur rythme. Après 1h45 de course, nous arrivons au sentier qui doit nous emmener tout droit au volcan, là haut, à 2320m d'altitude. 

Les sensations mitigées du début de course se confirment car après seulement dix minutes, de montée, j'ai les jambes coupées et flageolantes. Aîe, ça part pas bien cette affaire! Heureusement, le rythme n'est pas trop élevé. Je bois et mange tout ce que j'ai à portée de main : barres de céréale, pâtes de fruit, gels énergétiques en espérant que ça passe. Pendant ce temps, j'ai laissé Stéphane et Vincent légèrement devant. J'espère les retrouver là haut quand j'aurai réglé mes petits problèmes. 1h30 plus tard, les jambes sont bien revenues mais c'est maintenant le ventre qui fait des bruits bizarres (désolé pour les coureurs qui me suivent). Décidément, les premiers kilomètres de ce Grand Raid 2010 ne me sourissent pas beaucoup.

 

Heureusement, à l'arrivée sur les bords de l'enclos du volcan au niveau de Foc Foc, je retrouve Stéphane et la vision des coulées de lave et du cône éruptif encore actif donne du baume au cœur. Le spectacle de la lave rougeoyante dans la nuit est tout simplement magique. Je resterais bien assis là à contempler les miracles de la nature mais j'ai quand même une course à finir (en fait, elle a à peine commencé...).

On trottine donc jusqu'au ravitaillement de Foc Foc que l'on passe vite pour rejoindre le poste du volcan et le premier pointage électronique.

 

VENDREDI 22 OCTOBRE

 

03h41 - 5h41 heures de course

Pointage du volcan, altitude 2320m

30km et 2600m de dénivelés positifs parcourus

Classement : 364ème

 

Je suis au volcan une quinzaine de minutes plus tôt que l'an dernier. Stéphane (Lardenois) est bien présent au poste comme prévu. Merci pour le ravito ! Les jambes vont bien mais le ventre ne me laisse pas tranquille. Malgré tout, nous avançons sans encombre avec le grand Stéph jusqu'au Piton Textor.

Les choses vont néanmoins se gâter à partir de là : je vais en effet passer les 10 km suivants jusqu'à Mare à Boue à visiter régulièrement en position accroupie les buissons au bord du chemin (je passe les détails peu ragoutants...). Je ne peux pas courir alors que j'avais prévu de le faire dans cette portion relativement roulante et agréable. Beaucoup de coureurs me passent et je prends mon mal en patience. Je suis également contraint de laisser partir Stéphane. La course est longue, ça va forcément passer. A part bien m'hydrater, il ne me reste de toutes façons que la méthode Coué.

 

06h47 - 8h47 heures de course

Pointage de Mare à Boue, altitude 1594m

60km et 3072m de dénivelés positifs

Classement : 402ème

 

Ouf, voici le ravito de Mare à boue. Mes problèmes digestifs ne m'ont pas coupé l'appétit : je retrouve par hasard Isabelle et je m'assois sur un lit de camp pour enfourner mon poulet et mes pâtes... agrémentés d'un sachet de SMECTA et d'une gellule d'ultra levure sortis de ma petite trousse d'urgence. pour faire passer le tout. Miam miam !

Après un gros quart d'heure d'arrêt, je repars pour la longue portion qui doit nous conduire à Hell Bourg via Bélouve. Le parcours ayant changé, je ne connais pas cette section et, bizarrement, je n'en garde pas de souvenir particulier, si ce n'est que mon transit semble redevenir normal et que mon rythme de course en devient du coup meilleur. La direction de course a finalement opté pour l'option chemins au lieu de la route comme initialement envisagé. Ca grimpe et ça tournicote pas mal mais cela reste praticable (cela ne sera pas le cas pour ceux qui passeront plus loin derrière, n'est-ce pas Flore ?). Ca y est, je double à nouveau des coureurs. J'espère du coup pouvoir reprendre Stéphane ou même Vincent (qui cavale visiblement assez loin devant) d'ici Hell Bourg.

 

11h03 - 13 heures de course

Pointage de Hell-Bourg, altitude 1000m

71km et 3578m de dénivelés positifs

Classement : 344ème

 

Effectivement, sur le stade de Hell-Bourg, je retrouve Stéphane qui n'est pas encore reparti. Sa femme Nadine m'offre un petit massage des mollets à l'arnica. Top! Stéphane repart pendant que je change de chaussettes et me dit qu'il y va tranquille pour que je le rejoigne. Ce sera chose fait 10 minutes plus tard.

La montée du Cap Anglais est un gros morceau que je découvre car je n'y suis jamais passé avant. Tout ce que je sais c'est qu'elle doit nous amener, au gîte du Piton des Neiges à près de 2500m d'altitude. Stéphane fait le rythme et je me cale dans son sillage. Ca grimpe dur sur certaines sections. Il faut parfois mettre les mains mais le ventre me laisse tranquille. Pour de bon j'espère. Après trois heures d'ascension plutôt régulière en dépit des difficultés, le gîte de la Caverne Dufour, à quelques encamblures du Piton des Neiges, est enfin en vue. Ravito express car Stéphane ne veut pas laisser Vincent trop loin devant. Je lui dis que je compte faire la descente rapidement pour pouvoir me poser plus longtemps que lui à Cilaos.

 

14h13 - 16h14mn de course

Pointage de la Caverne Dufour, altitude 2480m

81km et 5100m de dénivelés positifs parcourus

Classement : 295ème

 

J'entame donc la descente dans les 300 premiers, ce qui était l'objectif de départ. A ce rythme, il va falloir redéfinir un nouvel objectif : allez, vendu pour le top 200 !

Je chasse ces pensées de ma tête pour le moment car j'ai une grosse descente à faire et que j'ai hâte de retrouver Sophie et Antoine qui m'attendent à Cilaos. Après un bon paquet de concurrents doublés (j'en ai compté 20, ça distrait), j'arrive au pied de la descente avec de supers sensations. J'ai l'impression d'avoir vraiment progressé dans ce domaine car malgré les 1100 mètres de dénivelés négatifs avalés en à peine une heure après près de 90 kilomètres de course, je ne souffre pas du tout des jambes. Finalement, les escaliers de l'Axe Majeur de Cergy, c'est pas si mal comme entraînement !

J'enfile les 3km de route qui me séparent encore de Cilaos avec une bonne foulée et entre dans le stade. J'aperçois Antoine qui m'attend sur la pelouse. Je file directement prendre une assiette (poulets et pâtes, le menu habituel) et m'assois avec lui. Sophie arrive aussi, elle qui attend le départ du Trail de Bourbon prévu le lendemain matin à 06h00 depuis Cilaos. Stéphane débarque quant à lui une dizaine de minutes plus tard.

 

15h36 - 17h36 de course

Pointage de CIlaos, altitude 1224m

89km et 5121m de dénivelés positifs parcourus

Classement : 262ème

 

P1030315Antoine, s'occupe des petits détails (changement des piles de la frontale en prévision de la prochaine nuit, remplissage du sac avec les barres de céréales et les tubes de gel énergétique, etc...). Je n'ai rien d'autre à faire que de me changer et enfiler une tenue plus chaude (collant et tee-shirt long, comme l'an dernier) en prévision de la nuit dans Mafate. Surprise : un coup de téléphone de ma petite Margaux qui me demande si je "cours bien dans la montagne et si je vais lui ramener la médaille". Pas de problème, ma puce, c'est pas encore dans la poche, mais ça va le faire.

 

Stéphane et Vincent que j'ai aperçu furtivement sont déjà repartis et, quant à moi, je reprends la route après 45 minutes de pause salvatrice en famille. Je souhaite bonne chance à Sophie pour demain et je lui donne rendez-vous à l'arrivée de sa course à Saint-Denis dimanche matin. Elle s'est bien préparée, ça va le faire, y'a pas de doute. Quant à Antoine, je dois le revoir dans 1h30 environ au pied du col du Taïbit. En sortant du stade, et malgré une pause plus longue que prévue (oui, je sais Séb, je dois encore progresser là dessus), j'ai gagné près de 30 places. Il faut croire que le début du parcours et la montée du Cap Anglais ont fait des dégâts devant moi. Cela se confirmera par la suite puisque le taux d'abandon de cette édition 2010 sera un record : 45% des concurrents ne verront pas Saint-Denis.

 

Les jambes sont toujours nickel alors j'envoie bien dans la descente vers la Cascade Bras Rouge. Arrivé là, ça remonte version montagnes russes jusqu'à la route au pied du col du Taïbit. Je double, double encore et rejoins Stéphane à ce moment là puis Vincent qui est encore au ravito. Cela faisait plus de 80 kilomètres que je lui courrais après celui-là !

Antoine s'est fait amener en stop par la route et nous rejoint donc pile dans le timing au pied du col. Il nous accompagne pendant une quinzaine de minutes sur les premiers hectomètres de montée.

 

17h51 - 19h51mn de course

Pointage du début du sentier du Taïbit, altitude 1260m

97km et 5500m de dénivelés positifs parcourus

Classement 219ème

 

P1020135Après qu'Antoine nous ait quitté, je lâche un peu involontairement Stéphane et Vincent et franchis le col  du Taïbit alors que la nuit est maintenant bien tombée. Une descente rapide vers Marla et me voilà rentré dans le cirque de Mafate. Je suis juste heureux d'être là, en pleine possession de mes moyens et avec l'impression que rien ne peut m'arriver. Mais c'est maintenant, au début de la deuxième nuit, que la course commence vraiment.

 

Je décide d'attendre Stéphane et Vincent et prend le temps de bien manger. Je repars avec Vincent 15 minutes plus tard. Stéphane, partira juste derrière et nous rejoindra ensuite. Après une descente bien cassante comme Mafate en a le secret, nous arrivons à Trois Roches d'où nous repartons tous les trois de nouveau groupés après un arrêt éclair.

 

Je connais bien la portion entre Trois Roches et Roches Plate avec ses deux grosses bosses. J'en garde un bon souvenir de l'an dernier. Dès la première, je décide de faire le train et pousse fort sur les jambes. Derrière, ça ne suit pas. Tant pis, pardon les gars, je décide maintenant de faire ma course et de profiter de mes jambes encore presque neuves.

La musique dans les oreilles, j'avale la première bosse, court dans la portion plate jusqu'à la deuxième que je grimpe aussi rapidement. Je double quelques coureurs. Je retrouve cette sensation d'euphorie que j'avais éprouvée au même stade du parcours en 2009. C'est grisant, et en plus, cette fois, rien à signaler au niveau des genoux.

Après cette dernière bosse, la descente vers Roche Plate se passe bien... mais pas pour tout le monde apparemment car je m'arrête auprès d'un coureur qui a manifestement fait une  mauvaise chute. Deux autres concurrents sont auprès de lui. Ils ont déjà appelé le médecin de Roche Plate qui n'est heureusement pas très loin. Je boucle les 500 derniers mètres me séparant de Roche Plate où je rejoins Jean-Louis et Florent, qui, comme d'habitude, ont installé leur campement à l'école où ils sont connus comme le loup blanc. Là, je suis comme dans un stand de Formule 1 : je m'assois et ils 'occupent de tout. Une demi-bière (ben oui, faut se faire plaisir), du saucisson, de la soupe...

 

22h26 - 24h26mn de course

Pointage du de Roche Plate, altitude 1100m

111km et 6850m de dénivelés positifs parcourus

Classement 188ème

 

Dix minutes plus tard, après avoir fait le plein de leur bonne humeur communicative, c'est reparti, toujours avec la grosse patate, direction l'ilet des Orangers où j'arrive sans encombre... et en repars presque aussitôt car la nuit est fraîche et mieux vaut ne pas rester trop longtemps arrêté.

Après l'ilet des Orangers, on descend vers la Rivière des Galets et le ravitaillement de Deux Bras, porte de sortie de Mafate. Cette portion n'est pas évidente. Celle là non plus, je la connaissais pas. La descente, entrecoupée de petites remontées est bien casse-pattes. L'altimètre ne descend pas assez vite à mon goût. Faut que j'arrête de le regarder !

Si les jambes sont toujours OK, en revanche, les pieds commencent à souffrir à cause d'ampoules multiples. Pour me distraire, j'essaie de les compter juste en localisant les douleurs. J'arrive à un compte de six. Bon score! Alors que je pensais m'arrêter brièvement à Deux Bras, je décide finalement de faire un stop chez les podologues. Je suis très en avance, il vaut mieux ménager la monture car la route est encore longue et bien cassante.

 

SAMEDI 23 OCTOBRE

 

02h09 - 28h09mn de course

Pointage de Deux Bras - altitude 253m

126km - 7515m de dénivelés positifs parcourus

Classement : 166ème

 

Les tentes de Deux Bras sont encore assez vides, j'ai donc la chance d'avoir une podologue pour chaque pied et une kiné pour me masser chaque mollet. Cela a du bon, de faire la course dans les 200 premiers avant le rush du gros du peloton.

Mes ampoules soignées et mes jambes chouchoutées, je pars à l'ascension de Dos d'Ane. Je ne l'ai jamais faite de nuit, du coup, je manque de repère et la fin me paraît bien longue, jusqu'à l'apparition salvatrice des gros bambous. J'annonce à mon compagnon de montée qu'on y est presque ! Vu que je lui répète ça depuis déjà 15minutes, je ne suis pas certain qu'il me prenne au sérieux.    

 

Ouf, on y est. Encore un gros morceau d'avalé. Un petit effort pour rejoindre le ravitaillement 500m plus loin et, pas le temps de souffler, puisque après une longue montée, c'est maintenant une grosse descente qui se profile puisqu'on doit redescendre au niveau de la mer à La Possession. Cela commence par une portion bitumée où je cours à grandes enjambées alors que le jour commence tout doucement à pointer le bout de son nez marquant la fin de ma deuxième nuit sans sommeil.  Après ces quelques kilomètres de route, la descente se poursuit par le sentier de la Kalla. Je l'avais emprunté en montée lors de la course du même nom l'an dernier, mais dans le sens de la descente, c'est un supplice : les racines et les cailloux commencent à me fracasser les cuisses. Ca descend, ça remonte, je n'en vois pas la fin et profite d'être seul pour laisser échapper quelques jurons à haute voix. Même si ça ne fait pas avancer plus vite, ça soulage quand même !

 

Enfin, me voilà arrivé à La Possession. On m'annonce 152ème. J'appelle Antoine qui doit être en train de redescendre en voiture depuis Cilaos pour vérifier qu'il est bien dans les temps pour être au prochain ravitaillement de la Grande Chaloupe. Je lui dis que je ne m'arrête pas à La Possession car les places sont dures à gagner et que l'objectif est maintenant d'essayer de finir dans les 150 premiers. Tout va bien, il est sur la route et sera là à l'heure. Good job frérot !

 

07h15 - 33h15 de course

Pointage de La Possession - altitude 15m

142km - 8473m de dénivelés positifs parcourus

Classement : 152ème

 

J'embraye donc tout de suite en direction du chemin des Anglais et ses pavés complètement défoncés (super pour les articulations qui n'avaient pas besoin de ça). Malgré l'heure encore matinale, c'est un véritable cagnard. Il n'y a pas un arbre et donc pas d'ombre. On pourrait faire cuire un oeuf sur le plat sur les pavés. Je plains ceux qui passeront ici entre midi et deux et je m'asperge avec les bidons en essayant de ne pas perdre de vue les coureurs que je vois au loin devant moi, mais c'est dur. Après une succession de montées et descentes, j'arrive à la Grande Chaloupe et Antoine m'attend en bas du chemin. Il m'accompagne sur les 500 mètres jusqu'au ravitaillement. Ca y et, je commence un peu à accuser le coup. Aucune blessure, mais la distance et le dénivelé ont fait leur œuvre. Il faut maintenant serrer les dents jusqu'à l'arrivée. Heureusement, elle n'est plus très loin désormais.

 

P1020175A la Grande Chaloupe, je change de chaussures et j'ai la surprise de voir des amis de mes parents en vacance sur l'île et qui m'ont connu gamin à l'époque où on habitait à Béziers qui m'attendent. Comme je suis un garçon bien élevé, je reste dix minutes de plus et prends mon temps au ravitaillement avant d'entamer la dernière grosse difficulté du parcours jusqu'au Colorado. Il ne reste plus qu'un peu moins de 1000m de dénivelés positifs. Une paille !

 

Le rythme est maintenant un peu plus lent mais je ne lâche pas et m'accroche à mon idée de rester dans les 150 premiers. Arrivé à Saint-Bernard, j'ai les yeux qui se ferment en marchant. Tiens comme l'an dernier à peu près au même stade. Je profite d'un stand de ravitaillement en eau pour m'allonger pour la première fois de la course. Je demande aux bénévoles de me réveiller dans 10 minutes où quand 10 concurrents maximum seront passés. Je somnole très légèrement et je les entends annoncer à deux concurrents "145 et 146ème". Je me lève alors et leur emboîte le pas après avoir remercié mes hôtes de fortune.

Je profite d'avoir un peu de compagnie pour parler un peu et tromper le sommeil. Je suis en compagnie de la 4ème féminine et de son compagnon de route. Je la félicite pour sa course et je lui dis que l'applaudirai sur le podium à l'arrivée puisqu'elle devrait figurer dans le top 3 de la catégorie sénior. S'en suivent quelques kilomètres de route bitumée où je décide d'embrayer et de fausser compagnie à mes éphémères accompagnateurs . Pour éviter de m'endormir, je me force à courir jusqu'au chemin qui doit nous amener au Colorado. Encore quelques dernières bosses, quelques ultimes racines, quelques pierres et voici le dernier ravitaillement de la course. Plus que 5km et une bonne descente avant l'arrivée. Si j'étais un cheval, ça sentirait bon l'écurie !

 

Antoine est là comme prévu, ainsi que mon beau-frère Christophe et ses deux enfants, Paul et Maylis.

Je pointe, on m'annonce 144ème. Cela semble être dans la poche pour le nouvel objectif 150 mais mieux vaut ne pas se relâcher. Et puis, j'ai un revanche à prendre sur la descente de Colorado qui m'avait fait souffrir pendant deux heures l'année dernière. Dernier objectif : la boucler en une heure maxi et on sera quitte !

 

11h37 - 37h37mn de course

Pointage du Colorado ) altitude 680m

157km - 9656m de dénivelés positifs parcourus

Classement : 144ème

 

P1020190Antoine va m'accompagner sur cet ultime tronçon en restant derrière moi. Je commence la descente assez vite etreprend deux concurrents. Derrière, cela ne revient pas. On fera donc la deuxième moitié plus "tranquillement" en discutant. A quelques encablures de la fin du sentier, un cameraman m'arrête pour une interview express. Je ne me souviens plus trop de ce que je lui ai raconté mais je repars vite en courant (pour l'anecdote, le cameraman en question sera mon voisin dans l'avion du retour).

 

Ca y'est, le pont Vinh Sanh est en vue et j'entends la musique monter du Stade de La Redoute. Je laisse Antoine filer devant dans les derniers hectomètres de la descente pour qu'ilm'attendre à l'entrée du Stade. Quant à moi, je me pose sur un rocher et prends le temps de savourer quelques minutes tout seul. J'ai une grosse pensée pour ma grande Margaux et mon petit Baptiste que j'ai laissés là bas, en métropole, et à qui j'ai hâte de raconter tout ça à mon retour. Je pense à ces derniers mois qui n'ont pas été faciles au niveau familial et au cours desquels les entraînements pour le Grand Raid tard le soir en rentrant du travail ont bien souvent été mon seul sas de décompression. Je laisse passer l'émotion qui commence à monter, repars et débouche sous le pont. 

 

Frédérique, une ancienne collègue de l'hôpital est là aussi. Elle a scruté ma progression sur internet. Elle me dit que tout mon ancien service de la DRH à l'hôpital a suivi mon avancée. Cela me touche beaucoup.

 

Je fais les derniers hectomètres qui me séparent du stade en courant. La différence avec l'an dernier est saisissante. Là où je boitais bas, je peux cette fois finir en ayant l'impression de faire mon footing dominical. Pari réussi : j'ai bouclé cette dernière descente en à peine une heure!

 

Un quart de tour de la piste du Stade et je passe sous l'arche d'arrivée. Quoi, c'est déjà fini? J'en voudrais encore un peu plus. Non ? Bon, tant pis. On m'enlève le bracelet avec la puce électronique et on me remet ma médaille et mon tee-shirt.

 

Clap de fin !

 

12h37 - 38h37mn de course

Arrivée à la Redoute; altitude 53m

163km - 9656m de dénivelés positifs parcourus

Classement final: 142ème au général et 69ème dans ma catégorie senior homme

 

 

P1020192


 

EPILOGUE :

 

A part mes soucis digestifs du début et quelques ampoules à la sortie de Mafate, ma course s'est déroulée comme dans un rêve long de 163km pour 38 heures et 37 minutes. Pas de blessure et une forme presque constante tout au long du parcours. J'arriverai même à me réveiller sans trop de problème le lendemain à 05h30 du matin pour redescendre au Stade et assister à l'arrivée de Sophie qui, après 24 heures dans les sentiers, en finissait presque tranquillement avec les 90km de son Trail de Bourbon.

 

Cette île est magnifique. Pendant trois jours, elle ne vit plus que pour le Grand Raid. Il faut le voir pour le croire. Et quand on y participe, on se sent privilégié d'être au centre de l'attention de tout le monde.

 

Je ne serai pas là l'année prochaine, j'essaierai de poursuivre d'autres objectifs, découvrir d'autres courses, d'autres aventures. Mais, c'est certain, je reviendrai, il y a trop de bonnes choses à vivre ici. Peut-être dans deux ans pour la 20ème édition avec, pourquoi pas, le doux rêve d'intégrer le top 100 de cette course mythique. Et dire qu'il y a deux ans à peine, je regardais de ma terrasse les lumières des frontales descendre vers l'arrivée depuis le Colorado en me disant qu'ils étaient bien fous tous ces gens de vouloir traverser l'île en aussi peu de temps. Aujourd'hui, avec deux Grands Raids dans les jambes, je suis définitivement l'un d'entre eux.

 

Un merci tout spécial à Antoine, qui était venu de métropole pour nous soutenir, Sophie et moi, dans notre aventure et qui a été d'une aide précieuse. Lui aussi n'a pas beaucoup dormi !

 

Merci à Sophie (et bravo à elle qui m'a littéralement épaté pour sa course menée de main de maître), Christophe et les enfants pour leur accueil chez eux, à La Montagne.

 

Merci aussi aux copains, ceux qui m'ont accompagné pendant une partie de la course ou attendus aux ravitaillements.

 

Merci à tous ceux (amis et famille) qui, de métropole ou d'ailleurs, m'ont accompagné par la pensée ou envoyé leurs encouragements par SMS pendant la course.

 

Merci à A2R pour m'avoir fait découvrir tout ça !

 

Merci enfin aux réunionnais pour permettre tous les ans à 2500 personnes de vivre une telle aventure.

 

Damien

 

GRR 2010-diplôme

 

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9 septembre 2010 4 09 /09 /septembre /2010 18:39

et ben le mien, il fait 7.99 kg... avec l'eau ! Et oui, les amis, il m'a fallu un peu rusé, j'ai du :

- avoir recours à l'eau liophyllisée pour les bidons,

- enlever 45 plumes de mon duvet (celles situées dans les coutures et qui ne servent à rien),

- découper mon tapis de mousse dans le sens longitudinal (le confort nuit à la qualité des nuits),

- oter poignée et ficelles de mes batons raid light,

- elimer les pointes des crampons dont nous n'aurons aucune utilité,

- enfin, arracher les 12 poils de brosse à dents se trouvant à l'horizontale et dont l'efficacité est quasi nulle...

 

Bref, je suis à 7.99 kg avec eau, duvet et pharmacie. La preuve en image :

 

                

 

                                                                                                    Seb, le coureur virtuel

Himal-Race 4369             Himal-Race 4373

                           Un sacré bardat ! 

 

Emballé c'est pesé pour 7,99 kg !

Himal-Race 4375

 

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8 septembre 2010 3 08 /09 /septembre /2010 12:15

L’objectif de ce « Week End choc » est bel et bien de tester notre matériel et de voir où nous en sommes dans notre préparation pour cet Himal Race. L’occasion nous est également donnée de nous plonger dans  le périple dont le départ est  prévu le 4 Octobre prochain.

 Programme de cette sortie de 2 jours :

  • Col des Bœufs – Hellbourg – Gîte puis sommet du Piton des Neiges pour le samedi

      (30 kms pour 2 500 D+),

  • Sommet du PDN – Cilaos – Col du Taïbit – La Nouvelle – Col des Bœufs pour le dimanche

      (30 kms – 2 000 D+)

 

  Himal-Race 4343Himal-Race 4342

                Nous disposons de produits magiques                                            On a parfois envie de se jeter à l’eau

                           dans nos gourdes                                      

 

 La première journée nous permet de traverser le cirque de Salazie sous un soleil merveilleux. La foulée est légère, le pas assuré et l’envie de profiter de l’environnement intact. Joël grimace pourtant, son genou le tiraille.

Les premiers pas nous permettent aussi de réaliser la nécessité de certains réglages sur nos sacs mais globalement, tout va bien.

 

Himal-Race 4344

 Un déjeuner réparateur !

 

La montée vers le sommet est raide et difficile après ce si bon repas. Joël mène le bal, je choisis pour ma part de grimper sans l’aide de mes bâtons, histoire de renforcer mes guiboles. Le soleil nous berce, on se régale.

 

Himal-Race 4345Himal-Race 4350

 Les guerriers en action…

 

 

A 18h, nous parvenons enfin au sommet du Piton. Le temps est frais, un air glacé nous transperse les os, les conditions sont rudes. En quelques minutes, il nous faut monter la tente. C’est difficile, il va falloir s’entraîner pour être opérationnel. Nous rencontrons aussi quelques problèmes pour faire cuire la soupe… C’est pas encore gagné ! Heureusement le spectacle est grandiose.

 

Himal-Race 4357Himal-Race 4362

 

 

Les températures descendront jusqu’à 3° la nuit à l’intérieur de la tente mais notre matériel tient bon et nous avec. Le lendemain, nous bouclons notre périple après 10 heures de marche quasi non stop. Quelques frayeurs pour le genou de Jo mais énormément de plaisir. Nous sommes fin prêts pour cette folle aventure de 5 semaines en Himalaya et ces 22 étapes de 900 kms.

 

 

 

 

 

 

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18 juillet 2010 7 18 /07 /juillet /2010 15:55

Cette année, elle a bien lieu. Dans le sens sud – nord pour cette fois-ci. Il y a longtemps que je voulais la faire, mais ça tombait toujours mal. Cette année, c’est la bonne.

 

En autonomie presque complète ? Ca me va très bien. Mais que faut-il emmener ? 2 priorités : la bouffe et le froid. On est en juillet, en plein hiver. Justement, la météo nous annonce un gros refroidissement dans les hauts… Quant aux ravitaillements de la course, effectivement, que de l’eau, sauf à Cilaos.

 

Combien de temps je vais mettre ? C’est ce que tout le monde me demande. Je table entre 20 et 24 heures. Histoire de prévoir ce qu’il faut emmener pour ne pas mourir de faim.

 

Comme le départ est très loin de l’arrivée, puisqu’à 97 km, il faut prévoir la logistique du transport. Nous voilà donc Myrielle et moi samedi à 3h du mat, 2 nanas à poiroter sur le bord de la route à Saint-Louis en attendant notre chauffeur qui nous prend au passage. S5003837.JPG

 

Départ à 4h sur le stade de Saint Joseph. Fichtre, nous ne sommes pas nombreux. 126 inscrits et que 85 à répondre à l’appel. Dont 8 femmes, le quota des 10% est respecté. Je ne connais que Myrielle dans le lot. Nous courons souvent ensemble.

 

On commence par remonter le lit de la rivière des Remparts pendant 15km. Allure tranquille, surtout quand c’est plat, ce qui n’est pas ma spécialité. En fait, c’est du faux plat montant, mélange de sable et pierres. C’était mon terrain d’entraînement quand je préparais mes 555km dans le désert. Myrielle est partie devant moi rapidement. Je fais un bout de chemin avec Stéphane. On papote, l’Anapurna et le duathlon de Cilaos étant des sujets de grand intérêt. Je suis surprise d’arriver si vite à Roche-Plate. Je réussis quand même à me casser la figure en évitant une flaque d'eau. De quoi avoir les pieds trempés, ça promet.

 

1° pointage à Roche-Plate. On m’annonce que je suis la 2° femme. Ah bon. Myrielle est devant, c’est sûr. Je rattrape rapidement la 1°, et ce n'est pas Myrielle, mais Sophie, que je ne connaissais pas. Je passe devant et attaque la montée avec aisance. La dernière fois que je suis passée là, c’était l’année dernière, mais dans l’autre sens et en VTT pour le Réunion d’Aventures. Le portage dans la partie haute, quelle galère ! C’est bien mieux à pied. Il fait jour maintenant, quelques goyaviers agrémentent le chemin. Le temps à la pluie se lève. La montée n’est pas si longue que ça.

 

Au Nez de Bœuf, on me confirme que je suis en tête. Sophie est restée juste derrière moi. Où est passée Myrielle ? On m’indique la direction à prendre, il faut rejoindre le GR qui descend vers Mare à Boue, et il y a plein de chemins dans ce coin. Evidemment, j’ai réussi à me fourvoyer. Pourtant je connais bien le coin. Arrivée à une intersection de sentiers avec la piste équestre, j’ai suivi une rubalise vers la gauche, en doutant de la direction. Au bout de quelques centaines de mètres et d’une intense réflexion, non, ce n’est pas possible, je vais vers Bourg-Murat au lieu de Mare à Boue. Demi-tour illico. Effectivement, c’était de l’autre côté, le côté sans rubalise…

 

C’est la descente vers Mare à Boue. Assez glissante. Je préfère ne pas prendre de risque et reste prudente, même si Sophie est sûrement passée devant. Je la retrouve à Mare à Boue, elle s’est arrêtée avec son assistance. Moi je n’en ai pas et je n’en ai pas besoin. Au ravitaillement, surprise : les bénévoles nous ont concocté des gâteaux. Super le gâteau patates ! Surtout que j’ai peu mangé depuis le départ, je n’en éprouve pas encore le besoin. J’ai le droit à un petit interview de Radio Est. Je repars rapidement, et avant Sophie.

 

Un peu plus loin, je croise Jean qui m’encourage en faisant sa sortie du week-end. Ca fait toujours plaisir. Plus on monte vers le coteau Kervéguen, plus le sentier est humide, surtout qu’il a plu toute la semaine. Et les pieds avec, même si j’évite consciencieusement les flaques. La montée est maintenant solitaire, plus d’autres coureurs en vue, jusqu’à ce que Sophie me rattrape. On reste ensemble jusqu’au coteau Kervéguen, et nous en profitons pour faire connaissance. Puis vers le gîte du Piton des Neiges, elle part devant, je ne peux pasS5003896.JPG suivre son rythme.

 

Je la retrouve au pointage de Cilaos, ainsi que Stéphane. J’ai des nouvelles de Myrielle, elle est bien derrière, mais où ? Il est midi, c’est l’heure de se mettre à table. Après une double portion bienvenue de sauté mines et rapidement avalée, nous repartons ensemble Sophie et moi vers le col du Taïbit, avec d’autres coureurs. A nouveau je ne suis pas le rythme, et Sophie et Stéphane s’éloignent devant. Sophie est beaucoup plus fraîche que moi, et je me dis que si j’arrive une demi-heure derrière elle, c’est bien. En fait elle me mettra la bagatelle d’une heure et demie !

 

La montée du Taïbit m’apparaît laborieuse, mais tout de même assez rapide. Je ne regarde jamais ma montre, ce ne sont que des sensations. Enfin, la traversée de Mafate s’annonce, roulante jusqu’au bout. Je veux en faire le maximum avant la nuit, qui me ralentira. J’aperçois la rivière des Galets tout en bas. Fichtre, l’eau est haute et boueuse. Pas jojo. On traverse quand même facilement. Par contre à Trois-Roches, le gué est submergé. J’y suis à la nuit tombante. Comme j’ai enfin les pieds secs, je me paye le luxe de me déchausser pour traverser. Priorité au confort de mes petits pieds.

 

Je m’installe donc pour la nuit, en solitaire. Cela ne me gêne pas du tout. Je pense à Myrielle derrière qui n’aime pas courir seule, et encore moins de nuit. Je pensais qu’elle me rejoindrait à la halte de Cilaos, mais non. De nuit je cours moins. Je préfère que le sentier soit dégagé, ou avec de bonnes marches. Du coup, c’est plus facile de récupérer. J’accélère dans la descente de Roche-Plate. Dans le village, mais il est où ce foutu ravitaillement ? Tout en haut, il ne manquait plus que ça.

 

J’y suis accueillie par Florent qui m’a attendue spécialement. Il me bichonne, bien qu’il ne puisse pas grand chose pour moi, à part me remplir ma poche à eau et me donner des nouvelles de ceux qui sont devant. Il est 20h, Thierry est arrivé depuis 2h. Chapeau ! Florent m’accompagne jusqu’à la Brèche, il ressort de Mafate par le Maïdo. Aux Orangers, on sait qu’il reste encore cette interminable canalisation du même nom à parcourir. Courage, et on court tout du long, allez, elle est facile. Au niveau estomac, je commence à ne plus pouvoir rien avaler. Ce n’est pas grave car je me sens bien à part ça, même si ce n’est pas très agréable. Néanmoins je m’oblige consciencieusement à mâchouiller demi-biscuit par demi-biscuit. Tout au bout, vers la mer, le ciel flamboie dans la nuit. On dirait qu’il y a un grand incendie. En fait ce ne sont que les lumières du Port. C’est impressionnant. Je croise un coureur qui va dans le mauvais sens, alors que je n’ai plus vu personne depuis un bail. C’est le copain de Myrielle qui la rejoint, elle n’est pas loin derrière, et a le droit à un chevalier servant.

 

Voilà les 10 ultimes km de descente vers l’arrivée. Ne pas louper le sentier qui raccourcit la piste. Les rubalises ne sont pas évidentes à voir de nuit. J’ai même failli louper le dernier pointage. Il n’y avait personne, j’ai dû appeler. Si près du but, je suis obligée de changer les piles de ma lampe. Le petit sentier est raide et étroit, il vaut mieux bien voir où on met les pieds. Traversée du village de Sans Souci. En bas, heureusement que je connais bien le coin pour trouver le sentier de la cheminée qui évite la route et qui mène à la rivière des Galets, car je n’ai pas vu de rubalise pour le signaler. A l’époque où j’étais à Cambaie, c’était mon terrain d’entraînement.

 

Traversée finale de la rivière des Galets. Le gué est sous l’eau, mais je n’enlèverai plus mes chaussures. On passe donc la ligne d’arrivée du stade de la Rivière des Galets les pieds trempés. Il est temps, mon estomac est maintenant sérieusement réfractaire à tout effort… Et il me reste plein à manger dans mon sac. Il vaut mieux ça que le contraire, au moins j’ai eu l’esprit tranquille sur ce point, même si j’ai porté pour rien. L’arrivée est très calme, aucune activité, aucun coureur, juste 3 bénévoles. Ca fait bizarre. Moi qui comptais sur une bonne âme se rendant à Saint-Denis pour me véhiculer à l’autre bout de la Possession pour y terminer ma nuit, histoire de ne pas le faire à pied. Un coup de bol, il y a juste une dame qui attend son mari coureur et qui est très gentille de me conduire. Ouf !

 

Je finis 2° féminine en 21h07. Myrielle arrivera 20 minutes après. Nous sommes 58 coureurs à terminer, et la moitié de ces dames.

 

 

 

 

 

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